Archives de catégorie : Q19 – aabb aab’b’

Il faut que vous ayez bien regardé les cieux — 1896 (15)

Lafon in  L’année des poètes

L’aveu

Il faut que vous ayez bien regardé les cieux
Pour que leur tendre azur ait déteint dans vos yeux ;
Il faut que vous ayez bien embrassé des roses
Pour qu’elles aient saigné sur vos lèvres mi-closes.

Combien de blonds genêts, quand vous passiez près d’eux,
On offert leur pollen pour dorer vos cheveux,
Et combien de flocons de vierges avalanches
Ont doucement neigé sur vos épaules blanches ?

Les ruisseaux dont l’avril emmurmure les bois
Ont donné leurs appels de rêve à votre voix ;
Jaloux, les rossignols en gémissent encore.

Le ciel a pris pour vous des teintes à l’Aurore …
Mais moi, que le destin a fait naître rêveur,
Je ne puis vous offrir qu’une chose, mon cœur !

Q19  T13

Mes aïeules ont cru pendant des mille années — 1881 (11)

Paul Marrot Le chemin du rire

Les paradis fantaisistes, I

Mes aïeules ont cru pendant des mille années
Que l’âme, étant divine, avait des destinées;
C’est pourquoi, dégoûté d’un monde bestial,
Parfois, j’ai des rappels vers un monde idéal.

Mes aïeux ont compris après des mille années
Qu’on les trompait par des chimères surannées,
Que les sermons étaient des farces; c’est pourquoi
J’ai senti l’ironie éclore et rire en moi.

La vieille illusion, en ma cervelle, alterne
Ses airs avec les airs de la raison moderne,
Et le tout s’entremêle en étrange opéra.

Le doute est ondoyant, et fait de poésie,
Dans les champs où le blé des forts un jour croîtra,
Je te cueille, herbe folle, ô fleur de fantaisie!

Q19 – T14 – aabb  aab’b’ ! sévèrement anormal: les six premiers vers, du point de vue des rimes, s’isolent.