Archives de catégorie : Q27 – aabb a’a’bb

Comme je descendais les fleuves ravissants — 1956 (3)

Jacques Baron Les quatre temps

Eo rus

Comme je descendais les fleuves ravissants
L’oseille et la laitue prévoyaient le beau temps
Et le toit attendait le nid de l’hirondelle
Et se glissaient la loche et l’escargot fidèle

Sous l’herbe où se trouvait le chemin de l’amour
Balayé par le vent à la fin d’un beau jour
La vigne fleurissant me parlait encore d’elle
A la fin d’un beau jour arrivait l’hirondelle

La première hirondelle qui fait le printemps
Et refuse l’Afrique aux soleils tournoyants
Et ne veut plus croûter le pain des Infidèles

Je ne l’écoutais pas Je mettais tout mon zèle
A distribuer des graines à la basse-cour
Les graines du premier et du dernier amour

Q27 – T13 – y=x : c=a; d=b; e=b’

Salut à toi, Patrie, ô mère respectée, — 1900 (13)

Frédéric Bataille Nouvelles poésies

Salut à la patrie

Salut à toi, Patrie, ô mère respectée,
O ma France! Salut, grande ressuscitée!
Ah! ton sol nous est cher! Ah! ton ciel est si beau!
Devant les nations relève ton drapeau!!

A ta voix, l’avenir fécond sourit encore.
Va, poursuis saintement ta marche vers l’aurore,
Sans songer aux vautours qui rêvaient ton tombeau.
Ta route est la clarté: sois toujours le flambeau!

Donne à tes fils l’ardeur d’une âme magnanime,
Le courage, la foi, l’honneur, la loyauté,
Le saint amour du Juste et de la Vérité:

Car tu n’est vraiment grande et ton bras n’est sublime
Qu’en vengeant l’innocent opprimé par le crime,
France, soldat du Droit et de la Liberté!

Q27 – T27

Quand je touche rêveuse à ces feuilles sonores, — 1843 (9)

Marceline Desbordes-Valmore Bouquets et prières


Au livre de Consolations
par Monsieur Sainte-Beuve

Quand je touche rêveuse à ces feuilles sonores,
D’où montent les parfums des divines amphores,
Prise par tout mon corps d’un long tressaillement,
Je m’incline et j’écoute avec saisissement.

O fièvre poétique! O sainte maladie!
O jeunesse éternelle! O vaste mélodie!
Voix limpide et profonde! Invisible instrument!
Nid d’abeille enfermé dans un  livre charmant!

Trésor tombé des mains du meilleur de mes frères!
Doux Memnon! Chaste ami de mes tendres misères!
Chantez, nourrissez-moi d’impérissable miel:

Car je suis indigente à me nourrir moi-même;
Source fraîche, ouvrez-vous à ma douleur suprême,

Et m’aidez, par le monde, à retrouver mon ciel!

Q27 – T15 – Quatrains à trois rimes: aabb a’a’bb

Prions! De ses vertus une vierge parée, — 1824 (4)

Hippolyte Thomas
Sonnets

La prise d’habit

Prions! De ses vertus une vierge parée,
Chaste épouse du Ciel à la paix consacrée,
S’avance, et le front calme, aux pieds de l’éternel,
Prononce avec transport un serment immortel.

Simple fille des champs, par la grâce abreuvée,
Sur un riche avenir ta foi s’est élevée
Sublime est ta prière, ô touchante Israël;
De ses parfums pieux elle embaume le Ciel.

Athée, ah! Loin de moi va traîner ta souffrance,
Laisse-moi le bonheur, laisse-moi l’espérance:
Jusques à tes bienfaits épouvantent mon coeur.

Douce immortalité, que ma jeune pensée
Laisse aux regrets mortels sa dépouille glacée,
Trompe-moi, j’y consens: je chéris mon erreur.

Q27 – T15

‘parée’ et ‘abreuvée’ ne riment pas classiquement

Suspends, héros illustre, au temple de la gloire, — 1801 (1)

(Michel de) Cubières, jeune

Imitation du sonnet italien

Suspends, héros illustre, au temple de la gloire,
L’acier étincelant qui fonda ta victoire,
Et que ton jeune front, qu’ombragent les lauriers,
Serve éternellement de phare à nos guerriers.

Il est temps que le monstre échappé du Tartare,
Qui forgea contre toi plus d’un projet barbare,
Sur les rives du Stix, enchaîné désormais,
Te laisse ouvrir enfin le Temple de la Paix.

Elle attend le repos, notre chère Patrie,
Elle veut le devoir à ta main aguerrie,
Hélas! qui ne l’entend soupirer après lui?

Mars n’a que trop régné, c’est Astrée aujourd’hui
Qui, par toi de Thémis reprenant la balance,
Aux peuples opprimés rendra l’indépendance.

Q27 – T13

Ce sonnet est la traduction (désignée comme ‘imitation’) d’un sonnet d’un certain Povoleri, intitulé La Pace . Al cittadino Bonaparte. Cubières n’a pas respecté la disposition de rimes de l’original (abab abab cde cde). La mise en page est celle, habituelle depuis le milieu du 17ème siècle: quatre strophes de 4, 4, 3 et 3 vers respectivement, séparées par des lignes de blanc. Les premiers vers des deux quatrains, et le premier vers du sixain (deux tercets) sont marqués par un léger décrochement vers la droite dans la ligne. Cette marque de début d’unité strophique (qui était la règle au 16ème siècle) disparaîtra très vite, au profit d’un alignement strict des quatorze vers (quand il y en a quatorze). Le poème de Cubières est entièrement en rimes plates (aabb a’a’b’b’ ccd dee).