Archives de catégorie : 16v

Spèce ! de palmipède — 1983 (3)

Jacques Demarcq Derniers sonnets


Celle même, miss, taire
(semel)

Spèce ! de palmipède
le coup d’main, raté
appelle plus : à l’oued
sec ça sexe plie (d’suite)

Manche en 2 : d’Oise t’es
à cours tôt, ton bled
te marque (m’es témoin)
eh ! type mol au gîte

Descente des Romains
nos pères, p’tit qu’un raid
et tes barbares ! pfuit

Une peignée, soignée
dégats : comprennent vite
qu’honte
baigne où – t’es – né

Et ? …

Sur un monceau fuyant s’exerce ma chimère. — 1969 (7)

Joseph Djirian Kaléidoscope

L’écume

Sur un monceau fuyant s’exerce ma chimère.
Calme, calme la mer d’un bleu étourdissant,
Teinté par le soleil ; elle brasse le sang ;
Et mon âme s’émeut d’un parfum d’éphémère.

L’instant ce n’est qu’écume éjectée en dentelles
Qui se répand comme l’heur entravé. L’ardeur
De s’exalter ainsi que ces flots en fureur
Se pourchassant, hélas !, mais sans croiser leur zèle.

Tout bouillonne à souhait dans ce chaos sans bornes.
Ses crêtes se touchant, la frange qui les borne
Tisse le pavillon d’un royaume inconnu

Disputé par les flots. Illusion solitaire
Où baigne ma vigueur, qui teinte à son insu
L’élan fallacieux que la vie exaspère.

Une trouée en l’eau, la colombe s’immole
Quand d’ériger dessus, mon âme se console.

Q63  T14  -ff    16v

J’ai fini de trébucher: adieu les essais — 1947 (5)

Henri ThomasLe monde absent

Homo faber

J’ai fini de trébucher: adieu les essais
De l’âge ingrat, je foule allègrement la terre,
Je vais, robot sacré, dans ma propre lumière,
Ecoutant bourdonner mes rouages secrets.

Mon cœur a son déclic, mon sexe est une roue,
comme l’eau d’un moulin le sang la fait tourner,
éveil, et l’engrenage interminable joue,
le poème est parfois un graphique léger.

Oscillant dans le vent d’automne je m’avance,
par trois ou quatre feuilles mortes poursuivi,
le moteur est bercé par sa propre cadence.

Les tôles du fossé, lamentables débris
ont beau parler du grand déglingage final,
tranquille et composant chaque pas, je souris,

étant certain qu’un jour une flamme magique
ou logique consumera la mécanique

Q15 – cdc dxd + ee – 16v

Je ne vous ai jamais dit que je vous aimais — 1933 (11)

Armand Masson in Felix  Arvers : articles (fonds rondel, RF 21313)

à la manière de Paul Géraldy

Je ne vous ai jamais dit que je vous aimais
Et pourtant il y a longtemps que je vous aime
Plus que moi-même et plus même que mes poèmes
Mais je le cache, et vous ne le saurez jamais.

Je vous ai rencontrée souvent chez les Dufour
Seulement je suis excessivement timide,
Je restais là, avec ma tasse de thé vide,
N’osant rien demander, pas même un petit four.

Pourtant, vous avez l’air d’avoir bon caractère,
Mais vous êtes mariée, à ce que l’on m’a dit.
Alors, moi, j’ai pensé : Mon petit Géraldy,
Le mieux que tu aies à faire c’est de te taire.

C’est pourquoi, si plus tard, un beau jour, vous lisez
Ces vers où vous ne pourrez pas vous reconnaître
Vous vous direz « Qui donc cela peut-il bien être ? »
Et puis qui sait ? peut-être que vous m’écrirez.

Pastiche arv  4 qu à rimes embrassées

L’ombre noyait les bois. C’était un soir antique. — 1925 (3)

Albert Samain Poèmes inachevés

Améthyste

L’ombre noyait les bois. C’était un soir antique.

Les dieux puissants vaincus par le Dieu pathétique
Après mille ans d’Olympe avaient quitté la terre,
Et la syrinx pleurait dans Tempé solitaire.
Sur la mer en émoi, vers l’orient mystique

Une aube se levait. Pleins de souffles étranges
Les chênes renuaient des branches prophétiques,
Et les grands lys élus versaient leurs blancs cantiques
Aux lacs sanctifiés visités par les Anges.

Le ciel était plus doux qu’un col de tourterelle ….
Rêveuse en longs cheveux, nymphe lacune frêle
Tressait de pâles fleurs autour d’une amulette.

Et près d’elle, dans le crépuscule idyllique,
Un petit Faune triste, aux yeux de violette,
Disait sur un roseau son cœur mélancolique …

Et c’était le dernier amour du soir antique …

Q49  T14  –  y=x :e=a – 16v (a-   -a)

Mon rêve a regardé le très dolent cortège — 1900 (14)

– ? in Le Beffroi

Rédempteur

Mon rêve a regardé le très dolent cortège
Des pauvres sans espoir passer avec lenteur ;
J’ai songé, tout ce soir, que j’étais Rédempteur
Et que j’aimais d’amour la foule sacrilège.

Vers elle j’inclinais mon front libérateur
Et j’étais l’Attendu qui bénit et protège ;
La douleur se prenait au divin sortilège
Et tous venaient, venaient à moi consolateur :

Les délaissés, les gueux, les déçus de la vie,
Les pélerins lassés de la route suivie.

Et traînant après moi cet exode sanglant,
Je gravissais, chargé de la croix, mon calvaire ;
Des baumes s’écoulaient de la plaie à mon flanc.

Puis je mourais sur la plus haute des collines,
J’étais Christ ; et mes bras immensément ouverts
Attiraient vers mon cœur les âmes orphelines.

Q15  T24  s. long , 16v: Un distique plat est inséré entre quatrains et tercets

Rien n’est grand qu’avec Dieu; sa pensée est l’essence — 1840 (5)

Auguste Barbier Rimes Héroïques


Christophe Colomb

Rien n’est grand qu’avec Dieu; sa pensée est l’essence
Des nobles actions, des sublimes exploits;
Il élargit la tête, et donne la puissance
Aux plus frêles humains qui marchent à sa voix:
Heureux l’homme qui fonde en lui son espérance,
Et qui pour lui s’embarque en une tâche  immense!

C’est Dieu qui t’inspira, magnanime Génois,
Quand ton esprit rêvait une nouvelle terre.
C’est lui qui ranima ton courage aux abois
Dans l’ouragan sans fin de la rude misère;
C’est lui qui chez les rois d’un orgueil saint et beau,
T’arma contre la vie et son lâche troupeau.

En vain autour de toi l’Océan en colère
Roula sa verte écume et ses montagnes d’eau,
Dieu te fit sans terreur traverser l’onde amère,
Et rencontrer le monde enfant de ton cerveau.

babaa bcbcdd cdcd – disp: 6+6+4 – 16v

Auguste Barbier fait preuve d’audace en ajoutant deux vers plats au premier quatrain (faisant écho aux premiers vers habituels des tercets). Les critiques l’ont incité à ramener le poème à plus de sagesse ; ce qu’il fit dans une édition ultérieure.

Italie! Italie! Ah! quel destin perfide — 1821 (4)

Madame de Staël Oeuvres (tome XVII)

Traduction du sonnet de Filicaia sur l’Italie

Italie! Italie! Ah! quel destin perfide
Te donna la beauté, source de tes malheurs?
Ton sein est déchiré par le fer homicide,
Tu portes sur ton front l’empreinte des douleurs.
Ah! que n’es-tu moins belle, ou que n’es-tu plus forte?
Inspire plus de crainte, ou donne moins d’amour.
De l’étranger jaloux la perfide cohorte
N’a feint de t’adorer que pour t’oter le jour.
Quoi! verras-tu toujours descendre des montagnes
Ces troupeaux de Gaulois, ces soldats effrénés,
Qui, du Tibre, du Pô, dans nos tristes campagnes,
Boivent l’onde sanglante, et les flots enchaînés?
Verra-t-on tes enfans, ceints d’armes étrangères,
Des autres nations seconder les fureurs;
Et ne marchant jamais sous leurs propres bannières,
Combattre pour servir, ou vaincus, ou vainqueurs?

ababcdcdefefghgh – sns – 16v – tr

Quand Jésus expiroit, à ses plaintes funèbres, — 1821 (3)

Madame de Staël Oeuvres (tome XVII)

Traduction du sonnet de Minzoni sur la mort de Jésus Christ

Quand Jésus expiroit, à ses plaintes funèbres,
Le tombeau s’entr’ouvrit, le mont fut ébranlé.
Un vieux mort l’entendit dans le sein des ténèbres;
Son antique repos tout à coup fut troublé.
C’était Adam. Alors, soulevant sa paupière,
Il tourne lentement son oeil plein de terreur,
Et demande quel est, sur la croix meurtrière,
Cet objet tout sanglant, vaincu par la douleur.
L’infortuné le sut, et son pâle visage,
Ses longs cheveux blanchis et son front sillonné
De sa main repentante éprouvèrent l’outrage.
En pleurant il reporte un regard consterné
Vers sa triste compagne, et sa voix lamentable
Que l’abîme, en grondant, répète au loin encor,
Fit entendre ces mots: Malheureuse coupable,
Ah! pour toi j’ai livré mon Seigneur à la mort.

ababcdcdefefghgh – sns – 16v – tr

Ainsi donc ta valeur te fait monter au trône! — 1805 (1)

Michel de Cubières (jeune) Traduction d’un sonnet de Luigi Tardi

Imitation

Ainsi donc tavaleur te fait monter au trône!
Ainsi NAPOLEON que le peuple couronne,
Ne doit qu’à ses talens son Empire nouveau:
Il est de son pays le guide et le flambeau,
Il s’est créé lui-même: ô prodige héroïque!
L’histoire, dont la tâche est d’être véridique,
Aux travaux de César préfère ses travaux;
Pour lui la poésie apprête ses pinceaux;
Et déjà l’Italie, en grands hommes féconde,
Aime à le regarder comme un maître du monde.

Reçois le diadême, et que l’esprit divin
T’inspire ô mon héros! L’amour du genre-humain.
De ton couronnement les pompes magnifiques
Te mettent sur la terre au-dessus d’un mortel;
Mais souviens-toi toujours, du haut de ton autel,
Que les Rois les plus grands sont les Rois pacifiques.

aabbccddee – T15 – disp: 10+6 – 16v – tr

Michel de Cubières récidive (cf 1801.1), avec cette Traduction d’un sonnet de Luigi Tardi – Alla sacra Maestà di Napoleone – « Figlio di tuo sapere, della Vittoria / diletto …. » . Il ne respecte toujours pas la forme de son modèle, mais fait un effort pour échapper à la platitude (dans la disposition des rimes, uniquement) avec un dernier quatrain à rimes embrassées (deed). Le placement des vers dans la page (dizain plus sixain, tous deux alignés) est anomal.

Une épigramme-charade  de Rivarol « Avant qu’à mon dernier mon tout se laisse choir / Ses vers à mon premier serviront de mouchoir »
Oeuvre poétique: Les hochets de ma jeunesse
Pendant la Révolution, il composa 36 hymnes civiques sur les 36 décadis de l’année, et un poème sur le calendrier républicain
Son frère aîné, le marquis de Cubières a écrit L’Histoire des coquillages de mer et de leur amours