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Vous qui prêtez l’oreille aux accents de ma lyre, — 1874 (16)

Pétrarque trad. Philibert Le Duc

I – Proème

Vous qui prêtez l’oreille aux accents de ma lyre,
Aux soupirs dont mon coeur s’est nourri si longtemps,
Avant d’avoir compris l’erreur de mon printemps
Et ce que Dieu commande à ceux qu’il veut élire:

Si vous avez aimé, vous tous qui daignez lire
Ces rimes, où je pleure et les voeux inconstants
Et les vaines douleurs que dissipe le temps
Ne me pardonnez pas, mais plaignez mon délire.

Quand maintenant je songe au facile succès
Qu’auprès du peuple ont eu mes frivoles essais,
J’ai honte des lauriers que la sagesse émonde.

Car à quoi m’a servi ce nom dont je suis las,
Si ce n’est d’en rougir et de savoir, hélas!
Que tout rêve de gloire est le jouet du monde!

Q15 – T15 – tr

O vous qui dans ces chants pleins de mélancolie, — 1862 (7)

Henri Pell Poésies diverses

Imitation de Pétrarque

O vous qui dans ces chants pleins de mélancolie,
Ecoutez attentif le son de ces soupirs,
Qui nourrissaient mon coeur au temps de sa folie,
Alors qu’il bouillonnait d’ardeur et de désirs;

Je raconte en mes vers sur ma lyre amollie
Les chimériques maux, les futiles plaisirs,
Vous tous qui de l’amour gardez les souvenirs,
Vous plaindrez la douleur dont mon âme est remplie.

Maintenant que l’amour est éteint dans mon coeur,
Je sens avec effroi que ma funeste ivresse,
Fut longtemps un jouet pour un monde moqueur.

Mes erreurs m’ont laissé la honte et la tristesse,
Et j’entrevois, hélas!, dans mon accablement
Que tout est ici-bas chimère et denûment.

Q9 – T23 – tr  (Pétrarque, rvf 1)

O vous qui dans ces vers dispersés par ma veine — 1851 (4)

Alfred de Martonne Les offrandes

Aux Lecteurs. Imité de Pétrarque

O vous qui dans ces vers dispersés par ma veine
Ecoutez les soupirs dont j’ai nourri mon coeur,
Aux jours de ma jeunesse, en ma première erreur,
Quand j’étais un autre homme et je portais ma chaîne.

Du style varié dont j’ai chanté ma peine
Et ma vaine espérance et ma vaine douleur,
O vous qui de l’amour avez senti l’ardeur
Vous me pardonnerez la faiblesse incertaine.

Hélas! je le vois bien à mes derniers instants;
Du monde entier je fus la fable trop longtemps,
Et de moi bien souvent je rougis, quand j’y songe.

De ma démence ainsi ma rougeur est le fruit;
Le repentir amer, comme un remords le suit:
Je le vois: ce qui plaît au monde n’est qu’un songe.

Q15 – T15 – tr (Pétrarque rvf 1) « Ces quelques sonnets », explique l’auteur,  » sont extraits de cinq gros volumes, qui contiennent plus de vingt mille vers dans tous les rythmes. L’auteur, après les avoir relus au moment de l’impression, et perdu toutes ses illusions sur leur mérite, et n’a osé livrer que cette faible partie à l’indifférence du public, après l’avoir arraché à la sienne propre.  »

Une deuxième édition, avec 55 sonnets (5 de plus), a paru en 1868, sous le titre Ludibria Ventis.

Vous qui lisez mes vers, et, d’une oreille sage, — 1848 (2)

Camille Esménard du MazetPoésies de Pétrarque

1

Vous qui lisez mes vers, et, d’une oreille sage,
Ecoutez les soupirs dont j’ai nourri mon coeur,
Rappelez-vous qu’alors j’étais dans le jeune âge,
Que je suis revenu de ma trop douce erreur.

Du trouble à la raison, des pleurs à l’espérance,
Si d’un style inégal je passe tour à tour,
Sûr d’être pardonné, j’invoque l’indulgence
De ceux qui parmi vous aurons connu l’amour.

Je sais bien qu’aujourd’hui que le regret m’accable,
Pourquoi du monde entier je fus long-temps la fable:
Oui, je le sais, de moi je n’ai plus qu’à rougir.

Je reconnais encore, après tant de folie,
Que tout ce qui nous plaît et charme notre vie
Est un songe trompeur qu’un instant voit finir.

Q59 – T15 –  (Pétrarque, rvf 1)

Vous qui écoutez, aux rimes que j’ai répandues, — 1842 (8)

– comte Ferdinand de Gramont trad  Pétrarque in  Poésies de l’étranger


I
Vous qui écoutez, aux rimes que j’ai répandues, le son de ces soupirs, dont je nourrissais mon coeur, dans l’égarement premier de la jeunesse, quand j’étais en partie un autre homme que je ne suis;

Pour ce style dans lequel je pleure et je raisonne, et qui flotte de vains espoirs à la vaine douleur, je compte trouver pitié non moins que pardon chez tous ceux qui connaissent l’amour par expérience.

Mais je vois bien aujourd’hui comment pendant longtemps j’ai été la fable de tout le monde; aussi souvent, en face de moi, je me fais honte de moi-même

Et de ma vanité la honte est le fruit que je recueille, avec le repentir et l’éclatante conviction que tout ce qui charme ici-bas n’est qu’un songe rapide.

pr – tr  Le comte de Gramont fait comme le chevalier d’Arrighi (1838,9). Il traduit un sonnet en versets de prose, comme plus tard Jouve

Vous, qui prêtez l’oreille aux chants que la douleur — 1842 (5)

Comte Anatole de MontesquiouSonnets, canzones, ballades et sextines de Pétrarque

1

Vous, qui prêtez l’oreille aux chants que la douleur
Et la vaine espérance ont dicté à mon coeur,
Lorsque dans l’erreur du jeune âge,
J’étais encor loin d’être sage,

Si vous avez connu l’amour,
Ses tendres soins, son doux langage,
Vous daignerez me plaindre un jour.
Mais j’ai de ma douleur profonde,

De mes accens, de mes écrits,
Trop long-temps occupé le monde.
De mes torts la honte est le prix.

Eclairé par elle, j’appris
Que tout ce qui plaît sur la terre
N’est qu’une illusion légère.

 » Je n’ai pas voulu traduire tous les sonnets en sonnets, et j’ai même eu recours, pour eux, aux rythmes les plus variés, afin d’éviter les périls de la monotonie « .

aabbcbcdedeeff – 2m:octo, v.1, v.2: alexandrins – tr (Pétrarque, rvf 1)

Vous qui écoutez l’accent de mes soupirs exprimés en vers — 1838 (9)

Mr le chevalier d’ArrighiOdes et sonnets choisis de Pétrarque

I

Vous qui écoutez l’accent de mes soupirs exprimés en vers, dont je nourrissais mon coeur dans la première folie de ma jeunesse, quand j’étais presqu’un autre homme que je ne suis maintenant.

Du différent style dans lequel je pleure et je parle, flatté de vaines espérances et accablé d’une inutile douleur; s’il y a parmi vous quelqu’un qui éprouve de l’amour par preuve, j’espère trouver de la pitié plus que du pardon.

Mais je vois bien maintenant combien pendant long-temps je fus la fable de tout le monde; ainsi bien souvent j’ai honte de moi-même.

Et le fruit de mes rêveries, n’est que la honte, le repentir, et de connaître clairement, que tout ce qui plaît au monde n’est qu’un petit songe.

pr – rvf1  (premier sonnet de Pétrarque)