– (Philibert Le Duc, ed) Sonnets curieux et Sonnets célèbres.
Prométhée et le vautour
De ses cris Prométhée emplissait le Caucase;
Et l’éternel vautour, à sa proie acharné,
Plongeant son bec vorace ainsi que dans un vase,
Buvait le sang au flanc du pâle condamné.
Le roc entier tremblait de son faîte à sa base
Sous l’effort convulsif du Titan enchaîné …
Quand tout à coup l’oiseau que la fureur embrase
Releva vers le ciel son long cou décharné.
Et le vautour cria d’une voix lamentable:
– Entendrai-je toujours cet être insupportable
Eternellement geindre et poser en martyr?
Pense-t-il, ici-bas, être seul à souffrir?
Et croît-il que ce soit un grand sujet de joie
De ne manger depuis six mille ans que du foie?
Gabriel Monavon
Q8 – T13