Archives de catégorie : 9s

Vers de 9 syllabes

Si j’entendais faire un sonnet tendre, 1985 (6)

Maurice Regnaut Recuiam


Si j’entendais faire un sonnet tendre,
Il me suffirait, c’est vrai, de dire,
Avant de vous brûler, feuilles mortes,
Quel amour se voyait de ces lettres,

Mais j’aurais beau, en doux style ancien,
Comme au fond de la nuit parle en rêve
Et fou taciturne, oui, j’aurais beau
Amants duveteux, amants ailés

Exalter ébloui votre …………………………
…………………………………………………………….
……………………………………………………………..

Il faudrait aussi, sans main qui tremble,
Pour être fidèle au manuscrit,
Noter cris, horreur, plaintes opaques

bl – 9s – lacunaire

Nous avons pensé des choses pures — 1920 (11)

Paul ValéryAlbum de vers anciens

Le bois amical

Nous avons pensé des choses pures
Côte à côte, le long des chemins,
Nous nous sommes tenus par les mains
Sans dire … parmi les fleurs obscures;

Nous marchions comme des fiancés
Seuls, dans la nuit verte des prairies;
Nous partagions ce fruit de féeries
La lune amicale aux insensés.

Et puis, nous sommes morts sur la mousse,
Très loin, tout seuls parmi l’ombre douce
De ce bois intime et murmurant;

Et là-haut, dans la lumière immense,
Nous nous sommes trouvés en pleurant
O mon cher compagnon de silence!

Q63 – T14 – 9s

Il part très atteint et sans mot dire ; — 1903 (7)

Dr Abdullah-Djevdet-Bey in La jeune Champagne

D’un amour répudié

Il part très atteint et sans mot dire ;
Ses douleurs et ses aveux d’amant
Il les garde comme un diamant
Dans son cœur qui n’a pas su maudire.

Un silence rogue l’accompagne :
Il va tuer son rebelle espoir.
Il s’éloigne à travers la campagne
Où se déploie un triste soir.

Devant lui s’étire le chemin
Et se peuple d’images fatales
Soûles d’extases orientales.

Bref fut l’espoir, longue est l’agonie,
Et voici que le rêve d’hymen
Nimbe la funèbre symphonie.

Q62  T34  9 syll (v.8 : octo !)

Sur le petit chemin latéral — 1901 (1)

Charles-Adolphe Cantacuzène Sonnets en petit deuil

Sur le petit chemin latéral

Sur le petit chemin latéral
Quelques violons avec folie
Font résonner le langoureux val
De leur musique lente et jolie.

C’est un tendre chant hyménéal
Où, doux, le cœur à l’âme s’oublie, –
Et mon vague amour se trouve mal
Par la fraîche nuit déjà pâlie.

La passion, l’orgueil et l’espoir
Me sont un vide affreusement noir
Qui se débat dans l’âme torride ….

Mais peut-être que les violons
Et ces amoureux aux rêves blonds
Sentent dans leur cœur le même vide.

Q8 – T15 – 9s

Forte femme aux tétons lourds de lait — 1891 (7)

Pierre LouÿsLe Trophée des Vulves légendaires

Fricka

Forte femme aux tétons lourds de lait
Que d’un sursaut de rut tu retrousses,
Germaine au con rouge aux tresses rousses,
Puissante à jouir dès qu’il te plaît.

Ventre épais que précède une touffe
Et si difformément labouré;
Bras charnus où foisonne un fourré,
Et dont l’étreinte effrayante étouffe.

Femme au con maternel, tu ne sais
Que baiser et tu dis ‘C’est assez!  »
Tu ne sais pas que l’amour s’attache

A toutes les lèvres, à tous les trous,
Tu veux rester l’Epouse, la Vache
Et n’ouvrir que ta vulve aux poils roux.

Q63 – T14 – 9s

Mais toi, fleur de luxure, O Freia! — 1891 (6)

Pierre LouÿsLe Trophée des Vulves légendaires

Freia

Mais toi, fleur de luxure, O Freia!
Rose dont les poils sont les épines,
C’est ta bouche où vont les belles pines
Que ta langue en chaleur balaya.

Dans tes jambes où brûle la fièvre
Quand tes amants ont la tête en feu,
Pour accueillr leur geste et leur jeu
Ta vulve a des baisers sur les lèvres.

Elle palpite et s’ouvre à lécher,
Rose mousseuse et fleur de pêcher,
Elle s’écarte et jaillit à boire

Le nectar fou des frissons ardents,
Incitateur éjaculatoire
Des belles pines entre tes dents.

Q63 – T14 – 9s

Pour que Freia t’exauce, ô païenne! — 1891 (5)

Pierre LouÿsLe Trophée des Vulves légendaires

Ortrude

Pour que Freia t’exauce, ô païenne!
Tu l’as vaincue en lubricité,
Suçeuse au gland d’un cheval mâté
Tribade avec la chair de ta chienne;

Ta soeur t’a léchée en vomissant,
Tes enfants au berceau t’ont connue,
Ta fille a livré sa fente nue
A ta langue, et tu l’as mise en sang:

Et tes doigts mis dans ta vulve interne,
De ton sexe ont fait une caverne
Enorme pour un rut d’étalon

Et cependant Elsa vit encore,
Et de son ongle écaille à l’aurore
Des croutes de sperme au ventre blond.

Q63 – T14 – 9s

Ils te croyaient pure, Elizabeth! — 1891 (4)

Pierre LouÿsLe Trophée des Vulves légendaires – neuf sonnets sur les héroïnes de Wagner rêvés au pied du Vénusberg en août 1891.

Elizabeth

Ils te croyaient pure, Elizabeth!
Ils t’appellaient sainte, immaculée!
Mais tu riais d’eux, grande enculée,
Quand Tanhauser au lit t’enjambait;

Il n’hésitait, pour vivre sa vie,
Qu’entre le trou noir de ton anus
Et la vulve en chaleur de Vénus,
Mais tu l’étreignais, inassouvie.

Furieuse au hasard des coussins,
Refoulant son ventre avec tes seins
Tu fis pour lui ta bouche ordurière;

Et lui tendais l’horreur de ton cul
Tu le sentis foutre par derrière,
Et tu portais le corps du vaincu.

Q63 – T14 – 9s

Artiste, toi, jusqu’au fantastique, — 1890 (33)

Verlaine Dédicaces

A Charles de Sivry

Artiste, toi, jusqu’au fantastique,
Poète, moi, jusqu’à la bêtise,
Nous voilà, la barbe à moitié grise,
Moi fou de vers et toi de musique.

Nous voilà, non sans quelques travaux,
Riches, moi de l’eau de l’Hippocrene,
Quand toi des chansons de la Sirène,
Mûrs pour la gloire et ses échafauds.

Bah ! nous aurons eu notre plaisir
Qui n’est pas celui de tout le monde
Et le loisir de notre désir.

Aussi bénissons la paix profonde
Qu’à défaut d’un trésor moins subtil
Nous donnèrent ces ainsi soit-il.

aaaa  b’a’a’b’ T23  9s

Les Andains tour à tour sous la Faux — 1890 (20)

Karl Boès in L’ermitage

Rêve d’été

Les Andains tour à tour sous la Faux
Se couchaient, blonds et mélancoliques
Et l’Aoûteux prenait des airs bibliques
Avec ses tours de bras triomphaux.

Au fil d’un rythme lent jamais faux,
Les Epis tombaient et, symboliques,
Semblaient pleurer de tendres Suppliques –
Tels nos Cœurs sous vos pieds, ô Saphos !

Car le Champ est à vous, Moissonneuses,
Tout à vous, adorables Haineuses ! ..
Par un Couchant d’un fier Coloris,

Creusez rythmiquement la Blessure,
Et puissent nos Cœurs endoloris
Mourir, comme les Blés, en Mesure … ?

Q15  T14 – banv –   9s.