Guillevic sonnets : ed.1999
pour Jean TARDIEU
J’ai pour toi sur ma table un objet rond et lourd,
Un assez gros caillou pour qu’on le nomme pierre,
Ramassé l’an dernier près d’une sablière,
Couleur de longue pluie ainsi qu’était ce jour.
Je veux savoir de lui si je suis son recours,
Mais il répond toujours de façon outrancière,
Comme s’il refusait le temps et la lumière,
Comme un qui voit le centre et boude l’alentour,
Qui n’aurait pas besoin de se trouver soi-même
Et de chercher plus loin qu’on l’accepte ou qu’on l’aime,
Qui n’aurait le besoin, plutôt, de rien chercher.
Nous toujours à l’affût, toujours sur le qui-vive,
Nous qui rêvons de vivre une heure de rocher,
Cherchons dans le caillou la paix des perspectives.
Q15 – T14 – banv