Coll.sonnets et eaux fortes
– Joséphin Soulary
Une grande douleur
Comme il vient de porter sa pauvre femme en terre,
Et qu’on est d’humeur triste un jour d’enterrement,
Au prochain cabaret il entre sans mystère;
Sur les choses du coeur c’est là son sentiment.
Il se prouve en buvant que la vie est sévère,
Et, vu que tout bonheur ne dure qu’un moment,
Il regarde finir mélancoliquement
Le tabac dans sa pipe et le vin dans son verre.
Deux voisins, ses amis, sont là-bas, chuchotant
Qu’il ne survivra pas à la défunte, en tant
Qu’elle était au travail aussi brave que quatre.
Et lui songe, les yeux d’une larme rougis,
Qu’il va rentrer, ce soir, ivre-mort au logis,
Bien chagrin de n’y plus trouver personne à battre.
Q9 – T15