Archives de catégorie : octo

octosyllabe

Blanche beauté, douce merveille, — 1853 (1)

Evariste Boulay-PatySonnets

A une jeune fille

Blanche beauté, douce merveille,
Chaste enfant, légère et vermeille,
Je suis saisi d’un tremblement
Rien qu’à t’effleurer seulement;

O jeune fille sans pareille,
Bouton de rose, svelte abeille,
Non, non, je n’ose pas vraiment
T’entourer la taille un moment;

Je sens une frayeur étrange,
J’ai peur que tu ne sois un ange,
Et que tout à coup, à mes yeux,

Entre tes épaules si belles
Tu n’ouvres d’invisibles ailes,
Et ne retournes dans les cieux.

Q1 – T15 – octo

On voit en l’air une maison — 1852 (3)

M. l’Abbé Le Dru in Félix Mouttet: le livre des jeux d’esprit

Enigme 35

On voit en l’air une maison
Qui peut passer pour labyrinthe,
Où ceux qui cheminent sans crainte
Sont arrêtés en trahison.

C’est une fatale prison,
Un lieu de gêne et de contrainte,
Où leur pauvre vie est éteinte
Par un monstre plein de poison.

Sa malice est ingénieuse,
Et de Vulcain la main faucheuse
Dresse des pièges moins subtils;

Son art de bâtir est extrême,
Et sa matière et ses outils
Se rencontrent tous en lui-même.

Q15 – T14  octo Solution: l’araignée

Pendant les guerres de l’Empire, — 1852 (1)

Théophile GautierEmaux et camées

Préface

Pendant les guerres de l’Empire,
Goethe, au bruit du canon brutal,
Fit le Divan occidental ,
Fraîche oasis où l’art respire.

Pour Nisami quittant Shakespeare,
Il se parfuma de çantal,
Et sur un mètre oriental
Nota le chant qu’Hudud soupire.

Comme Goethe sur son divan
A Weimar s’isolait des choses
Et d’Hafiz effeuillait les roses,

Sans prendre garde à l’ouragan
Qui fouettait mes vitres fermées,
Moi, j’ai fait Emaux et Camées.

Q15 – T30 – octo

J’ai perdu ma force et ma vie, — 1850 (2)

Alfred de Musset Poésies nouvelles

Tristesse

J’ai perdu ma force et ma vie,
Et mes amis et ma gaieté;
J’ai perdu jusqu’à la fierté
Qui faisait croire à mon génie.

Quand j’ai connu la Vérité
J’ai cru que c’était une amie;
Quand je l’ai comprise et sentie,
J’en étais déjà dégoûté.

Et pourtant elle est éternelle,
Et ceux qui se sont passés d’elle
Ici-bas ont tout ignoré.

Dieu parle, il faut qu’on lui réponde.
Le seul bien qui me reste au monde
Est d’avoir quelquefois pleuré.

Q16 – T15 – octo

Dans ces élans de ma tendresse — 1847 (5)

dr. Alexandre Delainne Hommage lyrique aux sciences naturelles

A toi

Dans ces élans de ma tendresse
Lorsque mon cœur bat près de toi,
D’où vient mon indicible ivresse ?
Oh ! si tu le sais, dis-le moi !

Mon âme qui n’est plus maîtresse
De ses transports, de son émoi,
Vers la tienne vole, s’empresse
Et veut s’y confondre … pourquoi ?

C’est que du ciel l’ordre inflexible
Par ses lois, de l’être sensible
Veut aussi charmer le séjour.

Et l’attraction si féconde,
Ce sublime pivot du monde,
Entre nous deux s’appelle … amour !

Q8  T15  octo

Quel caprice vivant qu’Alice! — 1847 (3)

Charles Hugo in Album d’Alice Ozy

Quel caprice vivant qu’Alice!
Par caprice elle eut pour amant
Un prince. On ne sait pas comment
Elle le quitta. – Par caprice!

L’éclat n’a rien qui l’éblouisse.
Elle préfère à tout moment
L’humble fleur au fin diamant,
Du beau rayon le pur calice.

Aujourd’hui sans savoir pourquoi,
Par caprice elle m’aime, moi! –
Par caprice, elle m’est fidèle.

Je ne connais dans ses amours
Qu’un caprice qu’elle a toujours:
C’est le caprice d’être belle.

Q15 – T15 – octo  Un des poèmes écrits par un des fils de Victor Hugo, rival (malheureux) de son père pour les faveurs de la belle Alice Ozy .

Comme un torrent qui bat sa berge, — 1843 (22)

Ernest Prarond in Vers

Sonnet à Charles Baudelaire

Comme un torrent qui bat sa berge,
Le vent contre le ciel tonnait,
Et, sous le signe de la Vierge,
Tournoi de foudre se donnait.

L’éclair jouait de la flamberge,
La charge dans les airs sonnait,
Et sur une table d’auberge
Je vous écrivis ce sonnet.

Fier comme un bâtard des vieux reitres,
Un braconnier séchait ses guêtres,
Et fumait d’un air fanfaron !

Et tout, la fille comme l’hôte
Me rappelait presque sans faute
Le vieux style du vieux Scarron.

Q8  T15  octo

Si les plus beaux cheveux du monde — 1843 (4)

Gustave Levavasseur – in Vers

XXXI
Sonnet

Si les plus beaux cheveux du monde
Miroitaient sur sa tête blonde,
Son nez, galamment retroussé,
Taquinait une bouche ronde.

Main passant, le coeur détroussé,
Baissait les yeux, tout courroucé,
Sous son regard de Frédégonde,
Piteusement éclaboussé.

Que lui manquait-il donc? … Etait-ce
Ce teint si vanté dans Lutèce,
Où la rose le cède aux lis?

Non; mais vous eussiez cherché l’âme
En vain sous ses contours polis; –
La gaine n’avait pas de lâme.

aaba  bbab –T14  octo Un octave, et non deux quatrains autonomes

Du sonnet, moi j’ai la manie, — 1843 (3)

Gustave Levavasseur – in Vers

Sonnet

Du sonnet, moi j’ai la manie,
J’aime calembourgs et rébus,
J’aime la royauté bannie,
J’invoque Pégase et Phoebus.

Je dis au soir ma litanie,
Et mon feutre insulte Gibus;
Je compterais pour avanie
De m’encaisser en omnibus.

Que l’on me fronde ou qu’on me loue,
Devant notre siècle de boue,
Je me couvre d’un air hautain;

Et si j’étais moine ou bien prêtre,
Je sais ce que je voudrais être:
Abeilard ou l’abbé Cotin.

Q8 – T15 – octo – s sur s

Ce livre est toute ma jeunesse; — 1840 (6)

Alfred de Musset Poésies complêtes


Au lecteur

Ce livre est toute ma jeunesse;
Je l’ai fait sans presque y songer.
Il y paraît, je le confesse,
Et j’aurais pu le corriger.

Mais quand l’homme change sans cesse,
Au passé pourquoi rien changer?
Va-t-en pauvre oiseau passager;
Que Dieu te mène à ton adresse!

Qui que tu sois, qui me liras,
Lis-en le plus que tu pourras,
Et ne me condamne qu’en somme.

Mes premiers vers sont d’un enfant,
Les seconds d’un adolescent,
Les derniers à peine d’un homme.

Q9 – T15 – octo