Archives de catégorie : oulipisme

Je zuiz le ténébreux, le veuf l’inconzolé — 1997 (6)

Oulipo La Bibliothèque Oulipienne –  vol IV

El Dezdichado, ou S/Z

Je zuiz le ténébreux, le veuf l’inconzolé
Le prinze l’Aquitaine à la tour abolie
Ma zeule étoile est morte, et mon luth conztellé
Porte le zoleil noir de la mélancolie.

Dans la nuit du Tombeau, toi qui m’az conzolé,
Rendz –moi le Pauzilippe et la mer d’Italie,
La fleur qui plaizait tant à mon coeur dézolé,
Et la treille où le Pampre à la vigne z’allie.

Zuiz-je Amour ou Phoebuz? … Luzignan ou Biron?
Mon front est rouge encor du baizer de la Reine;
J’ai rêvé dans la grotte où nage la Zyrène…

Et j’ai troiz foiz vainqueur traverzé  l’Achéron:
Modulant tour à tour zur la lyre d’Orphée
Les zoupirz de la Zainte et les criz de la Fée.

Q8 – T30

Les amoureux fervents des fleuves impassibles — 1987 (7)

OulipoLa Bibliothèque Oulipienne , vol. II

Marcel BénabouAlexandre au greffoir


Les chats

Les amoureux fervents des fleuves impassibles
Aiment également, à l’ombre des forêts,
Les chats puissants et doux comme des chairs d’enfants
Qui comme eux sont frileux dans les froides ténèbres.

Amis de la science et de Pasiphaé,
Ils cherchent le silence et les cris de la fée;
L’Erèbe les eût pris aussi bien que l’Euripe,
S’ils pouvaient au servage gémir, pleurer, prier.

Ils prennent en songeant le sévère portique
Des grands sphinx allongés au Théâtre Français,
Qui semblent s’endormir aux feuillets souvent lus;

Leurs reins féconds sont pleins d’une profonde nuit,
Et des parcelles d’or, plus belles que vos jours,
Etoilent vaguement les grands pays muets.

bl

Un brave homme de bègue, assez cu-cultivé, — 1984 (2)

Boris Vian Cent sonnets


Simple histoire de bègue

Un brave homme de bègue, assez cu-cultivé,
Vivait de son ja-jardinet plein de fleurettes,
Plein de ca-calme et de repos, de violettes
Et de pi-pissenlits. Rien ne fut arrivé

S’il n’eût été go-goberger au pied levé
Sa cousine Julie, fille fort coqué-quette,
L’emmené-ner aux champs, pour faire la dînette,
Sur son baudet qui ruait sur les pa-pavés.

Mais dans les roseau-seaux, Pan vint se promener.
En le voyant-y-ant, l’âne brait. Etonné:
– Pan-Pan! fait notre bègue et le dieu tombe mort.

Le pauvre devint fou. Fou plus que lui n’y a.
Tous les matins dans sa cami-misole il sort,
Donner un biberon à ses bé-bégonias …

Q15 – T14 – Ces sonnets ont été composés vers 1944. On admirera la manière dont l’hendécasyllabe devint alexandrin

un corps à ce qui de lui dans le bruit et blanc — 1982 (2)

Henri Deluy –  in Action Poétique 87

Mots d’une seule syllabe

un corps à ce qui de lui dans le bruit et blanc
par le ou la les voit il dans le bruit si peu
très peu le bruit de la main et dans le bruit sur blanc
quand le jour plus loin de lui dans le buis est un

quand le bruit est un qui pend quand la voix le jour
point blanc qui le voit il voit quand la voix le froid
le froid si peu il en faut quand la voix du jour
il en faut si peu un corps dans la voix si peu

l’air de la peur rien dans le bruit un corps et blanc
qui pend il en faut le lieu la peur le dos rien
de main en main son dos un corps qui ne va pas loin

le lieu le point blanc et blanc l’air le froid son dos
quand le bruit est un qui pend qui ne voit pas loin
corps main loin voix la voix de main en main ne pas

r.exc.

Une erratique ruine aspire la semence — 1981 (2)

OulipoAtlas de Littérature potentielle

Claude Berge

14=15 – Sonnet loydien
à Raymond Queneau

Une erratique ruine aspire la semence
Lorsque pour nous distraire y plantions nos tréteaux;
La méduse gonflée s’épuise avec conscience
Dans le fond du bourbier où fermentent les mots …

Quand la vierge solaire au goût plein d’arrogance
Extrait le thalamus du vieux Jivaro beau,
L’Amérique du Sud sombre dans la licence
Alors que nous lions de piètres bigorneaux.

Que sa langue câline apporte ici l’émoi
Enfin papille tendre attise l’équivoque
Que mande l’envieux mâle et barbote le phoque!

Quand tu lis ce sonnet ne crois pas que c’est toi,
Bois et te baffre à Rio ploie ta taille élastique ….
Le nombre de ces vers devient problématique

Une papille tendre attise l’équivoque
Lorsque pour nous distraire y barbote le phoque!
La méduse gonflée s’épuise avec toi.

Dans le fond à Rio ploie ta taille élastique …
Quand la vierge solaire au goût problématique
Extrait le thalamus du vieux Jivaro beau

L’erratique ruine aspire la semence
Alors que nous lions plantions nos tréteaux;
Que sa langue câline apporte conscience

Enfin du bourbier où fermentent les mots …
Que mande l’envieux mâle et plein d’arrogance
Quand tu lis ce sonnet ne crois pas que c’est beau.

Amérique du Sud sombre dans la licence
Bois et te baffre de piètres bigorneaux.
Le nombre de ces vers devient ici l’émoi.

Q8 – T30

Mes encyclopédies reverrouillées sur le surnom de l’éloge — 1981 (1)

OulipoAtlas de Littérature potentielle

– Traduction d’un sonnet de Mallarmé selon la méthode S+7, à partir d’un dictionnaire analogique

Mes encyclopédies reverrouillées sur le surnom de l’éloge
Je souffle de préférer avec l’insociable technique
Un éboulis par mille ferments exorcisé
Sous le liseron au loin de ses levers de soleil record

Se précipité la neige avec ses absences de bruit de volant
Je n’y cacaberai pas de nu bucoliasme
Si cette très blanc de neige turbulence à l’égal de la noue rejette la demande
A tout coup d’oeil les scrupules du ciel insensé

Ma gourmandise qui d’aucunes cosses ici ne se complaît
Déchiffre en leur experte diminution un goût delicieux et balance
Qu’un brasille d’incarnat géant et embaument

La plante du pied sur quelque minotaure où notre sentiment bat le briquet
Je m’imagine plus longtemps peutêtre avec effarement
A l’autre à la mamelle carbonisée d’une échue cavalcade

vL

VIDESMOTNULGRA — 1977 (10)

Georges Perec Métaux

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VIDESMOTNULGRA
VUREMOTSPLANDI
VOIRELYSDUNMAT
VINTLARCDESMOU
VANCESMORTDULI
VIDELUSOMBRANT
VERSFILDONTMAU
VESATINMORDGLU
VILEMORTSDUNHA
VREQUANDMOTSLI
VRENTLOMISDUJA
VELOTDANS MURGI
VRANTDOUBLIMES
VOLSBRANDIMUET

Vides (mot nul)
Gravure (mots)

Plan d’ivoire
Lys d’un mot

Vint l’arc des mouvances
Mort du livide lu sombrant vers fil dont mauve satin mortel
glu vile

Morts d’un havre quand mots livrent l’omis du javelot
dans mur givrant d’oubli mes vols
(brandi, muet)

Lans-en-Vercors, 3 janvier 1977

LARCINSUDOMPTE 1977 (9)

Georges Perec Métaux

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LARCINSUDOMPTE
DUNSALIPROMETH
EUSMORDANTPLIB
LANCDESPRITMOU
DEFIANTLORSPUM
APIMENTDHORUSL
ARDFELINSOMPTU
EUXSPRINTMODAL
HUMANTDESPOIRL
EMPANSORTIDUFL
ANCTROUSDELIMP
AVIDEMORTPLUSN
ESURPLOMBANTDI
TSDUMILANPROBE

Larcin su dompté
d’un sali Prometheus
mordant pli blanc d’esprit mou
défiant lors puma, piment d’Horus
(lard), félin somptueux

Sprint modal

Humant d’espoir
l’empan sorti du flanc
trous de l’impavide mort
plus ne surplombant
dits du milan probe

Lans-en-Vercors, 29 décembre 1976

DROITNULSMACHE — 1977 (8)

Georges Perec Métaux

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DROITNULSMACHE
FERSLOTHUMAIND
UNMEPHISTOLARD
ANTDOLMURISPHE
RIQUESDONTMALH
EURSYLIANTDHOM
MESDINTOXHURLA
NTMAISLEJOURDH
UIMANCHOTLESDR
ACHMESDORUNLIT
TRESCHAUDLOINM
ORPHINESTALMUD
TRAHISONDEMPLU
MEHORSLINDUBAT

Droit
Nuls mâchefers – lot humain d’un Méphisto
lardant dol mûri – sphériques
dont malheurs y liant d’hommes d’intox hurlant

Mais le jourd’hui manchot
les drachmes d’or
un lit très chaud, loin

Morphines
Talmud

Trahison d’emplumé hors l’indu bât

Lans-en-Vercors, 27 décembre 1976

METALGRISFONDU — 1977 (7)

Georges Perec Métaux

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METALGRISFONDU
AMBREFLOTSIDUN
SIMPLERONDTUAF
FIRMESVOLDUTAN
TPROMISFEULAND
ESFILMDOUTRANC
ESFLOTMUBRINDA
ILPARFUMDONTSE
PRENDUSAMIFLOT
LANFUITDOMBRES
REFUSANTDOMBIL
ICUNFLOTDRAMES
HURLANTDEFISMO
UFREINDALSTHOM

Métal gris fondu
ambre

Flot
Si d’un simple rond tu affirmes
vol du tant promis feu
landes
film d’outrances

Flot mû
brin d’ail
parfum dont s’éprend us à mi-
flot
L’an fuit d’ombres refusant d’ombilic un
flot
drames jurlant défis
mou frais d’Alsthom

Lans-en-Vercors, 24 décembre 1976