– Alphonse Allais Mes insolations –
La carpe
Tel un abstrait poivrot monolodivaguant,
Mélancolique et lente emmi les froides ondes,
O carpe, tu t’en vas rêvant et zigzagant,
Insouciante en tes solitudes profondes.
Ta métallique peau, qui colle comme un gant,
Te donne l’air d’un chevalier des autres mondes.
Quels pensers sont cachés – jamais se divulguant –
Derrière les vitraux de tes prunelles rondes?
Le flot léger qui naît de ton mouvement doux
Dans les herbes du fond fait un léger remous;
Et, sans craindre l’anguille et le brochet vorace,
Tu traces des arabesques à l’infini,
S’entrelaçant comme un souple macaroni,
Et des zigzags tels que – seule – la carpe en trace.
Q8 – T15