D’autres ont pour vous voir, vous aimer et sentir — 1905 (2)

Léon Deubel La lumière natale

La haine amoureuse

D’autres ont pour vous voir, vous aimer et sentir
Vos regards enchâsser en eux leurs diamants,
Puis, la fleur du blasphème à la lèvre, mourir
Loin de leur ciel et de leurs dieux, en vous nommant.

O source de blancheur que nul ne peut ternir,
D’autres ont habité leur rêve décevant
Et vous ont asservie à leur vaste désir
Comme un aigle asservit sa proie, en l’enlevant.

Moi, libre de vos liens déjà plus qu’à moitié,
Sans implorer de vous le pain de la pitié
Que l’on jette à celui dont l’âme vit sur terre,

Soucieux seulement de ne vous point chérir,
Je rentre dans ma haine ainsi qu’en un repaire
Pour y cuver le vin de votre souvenir.

Q8 – T14

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