Parnasse contemporain, II
– Ernest d’Hervilly
A Cayenne
Midi. Pas d’ombre. Un ciel d’acier, pulvérulent.
La terre, brique sombre, au soleil se fendille.
Par moments, une odeur lointaine de vanille
Flotte, exquise, dans l’air immobile & brûlant.
Là-bas, longeant la mer huileuse qui scintille,
S’alignent les maisons aux murs bas peints en blanc,
En rose, en lilas tendre, en vert pâle, en jonquille,
De la Ville, où chacun sommeille pantelant.
Sur la plage, qu’un fou traverse à lourds coups d’aile,
Seul, & nu comme un ver, flâne un négrillon grêle,
Au gros ventre orné d’un nombril proéminent;
Ouvrant sa lèvre rouge où la dent étincelle,
Heureux comme un poisson qui nage, il va, traînant
Un crapaud gigantesque au bout d’une ficelle.
Q17 – T7