– Pierre Gripari L’Enfer de poche
Sonnet Chilperic
Chilpéric
Le matin
Prend sa trique
A la main.
Quelle faim
Frénétique !
Il s’astique
Le boudin.
L’ingénue
Bien connue
Des savants
Sous le nom de
Frédégonde
Prend son gland.
Q10 T15 3s
– Pierre Gripari L’Enfer de poche
Sonnet Chilperic
Chilpéric
Le matin
Prend sa trique
A la main.
Quelle faim
Frénétique !
Il s’astique
Le boudin.
L’ingénue
Bien connue
Des savants
Sous le nom de
Frédégonde
Prend son gland.
Q10 T15 3s
– Pierre Gripari L’Enfer de poche
Sexy Dracula
Je connais bien le comte Dracula
Et je souris, quand j’entends ceux qui disent
Que les fleurs d’ail, et tout le tralala,
Balles d’argent, miroirs, latin d’église,
Epieux pointus, conjurations apprises,
Ou crucifix peuvent le réduire à
Ce petit tas d’os et de cendres grises
Qu’un courant d’air emporte … au cinéma !
C’est mon ami, je l’avoue, je m’en vante
Je suis de ceux qui volontiers le hantent,
Il me reçoit le soir, en son hôtel ;
Ses dents sont bien rangées, blanches, petites,
Mais ce qu’il a, c’est une belle bite,
Et ceux qu’il baise, il les rend immortels !
Q11 T15 déca
– Paul-Louis Rossi Inimaginaire IV
Sonnet idéologique en quatre langues sur la guerre des paysans
Alors cette fois merci, quand nous entendrons
Le coq chanter et sonner ensemble les cloches
We will be happy: Frères quel travail! Freu dich
Du Schöne … les buches enfin toutes fendrons
Quand à la rude église le gros Luther
Dira son sermon les Seigneurs comme des buches
Nous les fendrons tous, c’est ma foi la riche souche
Qu’il doit cogner pour vivre l’Homme, et lutter
To judge both the quick and the dead … pour juger
Ensemble morts et vivants, dit Thomas Münzer
Oui; conduis-nous comme des rosses aux sommets
Cibus orms et virgum asimo .. Si la mort
En écume nous vient à la bouche plus ne
Prierons ni vivrons jamais comme des porcs
r.exc. – m.irr
– Lionel Ray Inimaginaire IV
Dévotion
à la beauté déserte! ses rôles et ses parcs!
A une oreille sonore! à tant d’autres marches
Dans le bleu rare et proche, les tempêtes, la traque!
Aux très hautes partitions! brouillage et départ.
aux pierres des murs endormis! aux lampes-fenêtres!
aux touffes de la parole impatiente! au retour
des rires et des fièvres! aux oiseaux qui cherchent
leur ciel! aux paumes de la pluie! aux roses peintes!
à Notre-Dame de l’Impossible! dame des roches!
à une imploration! à la gaîté fréquente!
aux lèvres du soupçon! aux grilles entrouvertes!
aux nuits sans autrefois des morts, si peu secrètes,
sans paroles brisées, sans dérive et sans cris!
au temps désassemblé! à sa très sûre approche!
r.exc – m.irr
– Pierre Lartigue Inimaginaire IV
Ascension en Patchwork pour Cyrano de Bergerac
Ces cretonnes ces chutes de tissus croisés par
pleins camions comme des romans au hasard côte
à côte porte les près de ton oreille Ecoute
Ces pluies de taffetas cassé cette charpie
de tout imaginaire On dénoue quelque part
une fumée de laine sur les dunes des cata-
ractes blanches aux panaches d’eau chaude prends tous les coptes
prends le Tour du monde d’un gamin de Paris
et dans ces chasses fabuleuses taille découpe cache
ton coeur puis ces pauvres pages cousues à petits
points rêve que le grand vent te happe et t’arrache
papier qui tremble cerf volant frisson de quiche –
nottes Adieu mines d’or d’Eluard! Adieu pépites!
Adieu glaçons dans les poches de René Char!
r.exc. – m.irr
– Roger Gilbert-Lecomte Oeuvres complètes, II
L’Heur du Roy de Colchide
Je suis le fol Roy de Colchide
J’habite dans sept grands palais de Jade
Et j’ai sept caravelles dans ma rade
Qui m’apportent les trésors de l’Atlantide.
Pour avoir erré sur la mer viride
Dans un clair de lune de sérénade
Leurs pourpres gardent un peu du bleu fade
Des cieux où la nuit veut compter le vide.
Le seul sérail dont je fasse parade
C’est le ciel d’étoiles: j’entends, maussade,
Tintinabuler leur cristal limpide.
Je meurs de langueur. Dans mon coeur malade
Des poissons dorés à l’éclat splendide
Vont nageant en désespoir de noyade!
Q15 – T7 – 2m: 10s; octo: v.1; 11s: v.4 – y=x: c=b, d=a
– William Cliff Ecrasez-le
Plongeur
A Conrad Detrez
Il portait un oeil louche extraordinaire et répugnant
En plongeant la vaisselle en l’eau graisseuse et qui clapote
Il levait cet oeil louche aux trois clients de la gargote
Avaler faisait mal sous ce regard inquiétant.
Etait-il vraiment laid visage et corps absolument
Un monstre relégué aux profondeurs de cette grotte
A moitié camouflé par le comptoir et par la hotte
Enorme qui buvait la friterie et ses relents?
Je ne sais quelle grâce transpirait de sa personne
Noblesse du maintien beauté du geste affinité
Avec la majesté des grands malheurs qui nous étonnent
Vieilles malédictions ou catastrophes héréditaires
D’ancêtres très lointains acharnés pilleurs de charognes
Dont on paye aujourdhui le prix du vice et du péché.
Q15 – T17? – 14s – Formule des tercets approximative
– Yves Gasc – L’instable, l’instant (?)
1
Sur la lettre J en l’honneur de son nom
J. ma jacinthe mon jasmin
ma jaspe du Japon ma jade
jonquille de janvier ma joie
joyau du jour en mon jardin.
J. jarre d’eau jatte de lait
à jeun jeudi de jouissance
jour de jais jambes jumelles
jalousie jaune de juin.
En juillet les javelles jointes
Javelines et joncs de la joute
Jeu de la jungle juvénile
Jadis justice de Jésus
jeune jamais je n’ai jugé
si joli joug de jubilé.
bl – octo – J’emprunte cet exemple à un essai inédit de Mr Tuillière
– Pierre Albert-Birot Dix sonnets et une chanson
II
Oui le Sonnet n’a que quatorze vers
Certes plus de pieds sont à la caserne
Si vous préférez quatorze pins verts
Allez aux pins en ce qui me concerne
Vais à sonnet n’est pas piqué des vers
Direz que je m’éclaire à la lanterne
Soit! Tout flambant le moderne univers
Me plaît ce soir d’entrer dans la caverne
Pétrir le silence avecque la nuit
Cherche la loi comme un vieil alchimiste
Aimer ce qui sert barrer ce qui nuit
Tel mot n’entre pas tant pis on le tord
On fait le savant et on fait l’artiste
Ci-gît un sonnet peut-être ai-je eu tort
Q8 – T24 – 10s – s sur s
– René Char – Le nu perdu –
Déshérence
La nuit était ancienne
Quand le feu s’entrouvrit.
Ainsi de ma maison.
On ne tue point la rose
Dans les guerres du ciel.
On exile une lyre.
Mon chagrin persistant,
D’un nuage de neige
Obtient un lac de sang.
Cruauté aime vivre.
O source qui mentis
A nos destins jumeaux,
J’élèverai du loup
Ce seul portrait pensif!
s.rev – bl – 6s