– Henry Becque in Œuvres complêtes
Le mystère
De tes yeux
Exaspère
Jeune et vieux.
Fine et leste,
Elle nous
D’un seul geste
Dompte tous.
Tête blonde,
Gorge ronde
Et bras nus.
Colombine
Est cousine
De Vénus.
Q59 – T15 3syll
– Henry Becque in Œuvres complêtes
Le mystère
De tes yeux
Exaspère
Jeune et vieux.
Fine et leste,
Elle nous
D’un seul geste
Dompte tous.
Tête blonde,
Gorge ronde
Et bras nus.
Colombine
Est cousine
De Vénus.
Q59 – T15 3syll
– Francis Ponge – Dix courts sur la méthode
Le jeune arbre
Ta rose distraite et trahie
Par un entourage d’insectes
Montre depuis sa robe ouverte
Un cœur par trop en piété.
Pour cette pomme l’on te rente
Et que t’importe quelqu’enfant
Fais de toi-même agitateur
Déchoir le fruit comme la fleur.
Quoiqu’encore malentendu
Et peut-être un peu bref contre eux
Parle! dressé face à tes pères
Poète vêtu comme un arbre,
Parle, parle contre le vent
Auteur d’un fort raisonnement.
bl – octo
– Paul Eluard Capitale de la douleur
Le jeu de construction
A Raymond Roussel
L’homme s’enfuit, le cheval tombe,
La porte ne peut pas s’ouvrir,
L’oiseau se tait, creusez sa tombe,
Le silence le fait mourir.
Un papillon sur une branche
Attend patiemment l’hiver,
Son cœur est lourd, la branche penche,
La branche se plie comme un ver.
Pourquoi pleurer la fleur séchée
Et pourquoi pleurer les lilas?
Pourquoi pleurer la rose d’ambre?
Pourquoi pleurer la pensée tendre?
Pourquoi chercher la fleur cachée
Si l’on n’a pas de récompense?
– Mais pour ça, ça et ça.
Q59 – tercets non rimés – 15v
– Emile Cottinet – Ballades contre et sonnets pour –
Les ruines (Assyrie, Perse, Egypte)
Les grands troupeaux ailés gardaient vos portes colossales,
Vos palais où trônaient Sarçon, Sardanapale, Assur,
Où les soldats tombaient comme des épis de blé mûr,
Ninive, Baghdad, ô cités vaines et vassales!
Des archers défilaient, vêtus d’émail bleu, sur les purs
De Suze et de Persépolis, les jumelles royales,
Et l’Egypte dressait, dans le sable aux profondeurs pâles,
Son sphinx immarescible aux yeux noyés d’ombre et d’azur.
Passé, désert de cendre où des mirages formidables
Appellent notre rêve, ô Passé, pour tes yeux de fables,
Chemin mystérieux jalonné de tombeaux sans fin,
Tes colosses de pierre ou de métal, forces obscures,
Gisent anéantis parmi tes attributs divins.
Kronos a passé là – Dieu sourd qui détruit et qui dure.
Q16 – T14 – 14s
– Pierre Camo Cadences
Psyché
Sous quelle lampe penchée
Penses-tu, vaine Psyché,
Reveiller l’amour caché
Dont mon âme est détachée ?
Si le beau charme épuisé
Parfume encor ma pensée,
C’est comme la fleur blessée
D’un printemps désabusé !
Cette chère inquiétude
Qui fait ta sollicitude
Ne te découvrira rien
D’une secrète blessure
Où ta flamme ne peut bien
Raviver que ta brûlure !
Q63 T14 7syll on remarque, dans les quatrains, que b est la ‘rime hétérosexuelle’ de a, et b’ de a’.
– Albert Samain Poèmes inachevés
Améthyste
L’ombre noyait les bois. C’était un soir antique.
Les dieux puissants vaincus par le Dieu pathétique
Après mille ans d’Olympe avaient quitté la terre,
Et la syrinx pleurait dans Tempé solitaire.
Sur la mer en émoi, vers l’orient mystique
Une aube se levait. Pleins de souffles étranges
Les chênes renuaient des branches prophétiques,
Et les grands lys élus versaient leurs blancs cantiques
Aux lacs sanctifiés visités par les Anges.
Le ciel était plus doux qu’un col de tourterelle ….
Rêveuse en longs cheveux, nymphe lacune frêle
Tressait de pâles fleurs autour d’une amulette.
Et près d’elle, dans le crépuscule idyllique,
Un petit Faune triste, aux yeux de violette,
Disait sur un roseau son cœur mélancolique …
Et c’était le dernier amour du soir antique …
Q49 T14 – y=x :e=a – 16v (a- -a)
– Marcel Thiry Plongeantes proues
La Hollandaise avait à cause de ses îles
Un arôme mental de cannelle et de thé;
Par des Indes sa voix nous paraissait hantée
Et versait à nos cœurs l’espoir des beaux exils.
Des femmes font penser à des barques; mais elle,
Avec sa marche égale et sa tranquillité,
Evoquait, sur un moite océan, la montée
Calme d’un paquebot profilé sur le ciel.
Les jeunes gens surtout sentaient à son passage
Comme un appel de ce maritime infini,
Et son corps les tentait comme une colonie;
Cependant elle allait, sans fièvre et les yeux sages,
Parmi ce rêve et ces désirs d’elle insaisis,
Et traînait sans savoir son sillage d’Asie.
Q49 – T29 – On remarque que toutes les rimes sont ‘hétérosexuelles’: îles/ exils, thé/ hantée, etc. ( à l’exception du couple singulier/ pluriel de passage / sages); et toutes ‘soutenues’ (consonne dite ‘d’appui’).
– Alexandre de Virineau (= Fernand Fleuret) – Douze sonnets lascifs … –
Léda incomprise
Hortense a soulevé sa jupe à crinoline
Et fait glisser en bas son pantalon léger,
Car elle voit au loin vers elle converger
Tous les grands cygnes blancs dont le bec dodeline.
Sur le bord du bassin, provocante et câline,
Elle s’offre au grand mâle, et pour l’encourager ,
Lui sourit, puis tressaille en voyant s’allonger
Le beau col souple et blanc, vivante javeline.
Sous l’étrange désir dont l’ardeur l’obséda,
Elle s’ouvre en pensée à l’amant de Léda
Et croit enfin sentir le dard dans sa nature;
Mais le grand cygne blanc lève un œil étonné
Vers la fente impubère à l’étroite ouverture
Et s’éloigne déjà sans avoir deviné.
Q15 – T14 – banv
– Mélot du Dy Hommeries
Faites place,
Pince-nez,
A ces larmes
Du damné.
Qu’il éclate
De douleur
Dans la flamme
D’une fleur !
Et, plus morne,
Qu’il rapporte
A l’éden
A la geôle
Son nez jaune
De pollen
Q59 T15 3s assonances
– Tristan Derème La verdure dorée
LXV
Ni les roses, ni l’air morose que tu siffles
Sous les ifs, en gardant ces chèvres et ces buffles
Au crépuscule, vieux berger, joueur de flutes,
Sous la lune que frôle un ibis insolite,
Ni le soir calme, ni ces palmes immobiles
Ni les astres montant comme de lentes bulles,
Rien ne me distraira de la source où se mire
Son blanc visage au vert de la fraîche ramure.
Et dussè-je mener par les aubes allègres
Le troupeau jaune et noir des tigres et des zèbres,
Ou cueillir sur les monts la branche souveraine,
Que j’entendrais sa voix douce sur les fanfares
Et que son souvenir embaumerait mon rêve
Comme une rose à mes couronnes triomphales
Assonnances en deux systèmes : a) (vocalique) Q14 (i-u) T14 (è-ê-a) b) (consonnantique, incertain dans les tercets ) Q55 (fl-t l-r) ?