Dans mon coeur, sombre abîme, où, sous le pont du doute, — 1844 (1)

Pétrus Borel in L’Artiste

30 septembre

Dans mon coeur, sombre abîme, où, sous le pont du doute,
A flots silencieux coule l’impiété,
Où toute passion a son anxiété,
Où le rire poursuit ce que l’homme redoute,

Comme sur un rocher aride et culbuté,
Où jamais le chevreuil ne se suspend et broute,
Parmi les noirs débris de son épaisse croûte,
Au fond d’une profonde anfractuosité,

Depuis bientôt six ans une herbe humble et craintive,
Mais vivace, a grandi. Son front est soucieux,
Sa tige est pâle et frêle. Elle souffre captive!

Pourtant comme le chêne elle irait jusqu’aux cieux;
Pourtant, si vous vouliez, de cette chétive herbe,
Madame, vous feriez l’arbre le plus superbe!

Q16 – T23

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