Tu nous dindonneras encor plus d’une fois, — 1888 (1)

Maurice Donnay Autour du Chat Noir

La Fève

Tu nous dindonneras encor plus d’une fois,
Chère âme, et près des tiens nos moyens sont infimes.
Je me souviens toujours d’un dîner que nous fîmes,
Un beau soir, dans Auteuil, à la porte du Bois.

Et tu faisais de l’oeil à ton voisin d’en face
Et tu faisais du pied à tes deux amoureux
A gauche, à droite, et ton amant était heureux,
Car tu lui souriais tout de même avec grâce.

Ah! tu n’es pas la femme aux sentiments étroits
Qu’une fidélité trop exclusive gêne.
Entre tous, Pierre, Paul, Jean, Jacque, Alphonse, Eugène,

Tu partages ton coeur comme un gâteau des Rois.
Et si grand est ton art, aimable fille d’Eve,
Que chacun se croit seul à posséder la Fève.

Q63 – T30

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