– Jacques Réda La course
Le printemps
sur les Grands Boulevards
Rien, dans les branches où déjà se gonflent des bourgeons,
Ne retient ce matin la cataracte de lumière
Pour la première fois soudain brûlante – la première
Après tout un siècle d’hiver. Et lourd nous y nageons.
Sans foi parmi les claquements des ailes des pigeons,
Tout au long des Italiens, Montmartre, Poissonnière,
Englués par milliers dans la débauche printanière
Qui ruisselle des toits, flamboie au faîte des donjons
Bancaires étayés de géantes. Sur le bitume
Eblouissant qu’ont envahi des passants en costume
De fête, la chaleur a des frissons intermittents.
Mais laissons faire. La saison vaincra ses épouvantes,
Comme dans l’ombre qui noyait, près de l’Hôtel des Ventes,
Un petit paysage où l’or des anciens printemps
Brille encore.