– Sainte-Beuve Œuvres poétiques
Sonnet de Sainte Thérèse
A Jésus crucifié
Ce qui m’incite à t’aimer, ô mon Dieu,
Ce n’est pas l’heureux ciel que mon espoir devance,
Ce qui m’incite à t’épargner l’offense,
Ce n’est pas l’enfer sombre et l’horreur de son feu !
C’est toi, mon Dieu, toi par ton libre vœu
Cloué sur cette croix où t’atteint l’insolence ;
C’est ton saint corps sous l’épine et la lance,
Où tous les aiguillons de la mort sont en jeu.
Voilà ce qui m’éprend, et d’amour si suprême,
O mon Dieu, que, sans ciel même, je l’aimerais ;
Que, même sans enfer, encor je te craindrais !
Tu n’es rien à donner, mon Dieu, pour que je t’aime ;
Car, si profond que soit mon espoir, en l’ôtant,
Mon amour irait seul, et t’aimerait autant !
Q15 – T30 – 2m (v.1-3-5-7 : déca) – tr.