– Paul Reboux et Charles Müller A la manière de
Sonnets
II
Orgueil du grand sitôt en extase cabré,
D’ombre et torse forêt en qui la même absconse
Fut. Etoile vitreuse où le nombre s’annonce,
Ascension clamée au trouble de l’entré,
Accord du geste avec le destin conjuré,
Vertical attestée en sa double réponse,
Pourpre en immensité banale et, si je fonce,
Pars, cri silencieux, et règne, soupiré!
Alors quand révolu triple s’itérative
L’astre, flux que soudain cueille une main craintive
Où l’infini du peu déploie un vol impur.
Et l’arc ainsi bandé par la détresse aiguë
Fera, foudre d’acier, incendie et ciguë,
Luire des larmes d’or aux blancheurs du futur.
Stéphane Mallarmé
Q15 – T15 on remarquera que la dispositions des rimes n’est pas mallarméenne
Glose
Un groupe d’érudits prépare une traduction française des oeuvres de Stéphane Mallarmé. Cette entreprise, en raison des recherches qu’elle nécessite, n’aboutira pas, sans doute, avant de longues années. Nous ne pouvons aujourd’hui donner au lecteur que la traduction du premier de ces deux sonnets:
Quand le vaticinant I Quand le poète prophète
erratique I qui ne sait où il va
Au larynx dédaléen, I et dont la parole s’égare,
divague, I divague
en sa manie I en sa folie
tant dédiée I si coutumière
et avant tout I et qui, avant d’exister,
radiée de I se retranche même de ce
l’absent I qui n’existe pas,
pour animer I lorsqu’il va souffler
le syrinx de l’insaisissable, I dans une flûte sans son,
O n’être que I il rêve de n’être que
du sphinx I un sphinx
le mystère I dont l’énigme
aboli I n’ait pas de sens
par qui l’âme est congédiée I et de supprimer de l’âme
I tout ce qui n’est pas
du clair-obscur I complètement obscur,
O chevaucher I il rêve, chevauchant
le lynx, aveugle I un lynx aveugle
et de ses yeux exorbités I aux yeux arrachés,
vers la victoire I d’aller vers la gloire
irradiée I rayonnante!
Enigme I Etant une énigme
telle la Pythie I semblable à la Pythie
hypogéenne I qui vit sous la terre,
Ambage I Etant plein de détours
non pas un I multiples
d’où dévie l’inconnu, I d’où ne sort rien,
j’ai approfondi l’azur I j’ai reculé les limites
de l’impénétrable. I du galimatias.
Et, cygne ténébral I Et, poète ténébreux
Sitôt hiéroglyphique I dès que j’écris,
qu’ombre I que rend nul
en son vide I au sein de la nullité
un déléatur I un signe de suppression
obstructif, I paralysant,
J’offusque, I Je réponds
triomphal, I triomphalement
le néant qui m’assigne. I au défi du néant.
Les cryptographes ne se sont pas jusqu’ici mis d’accord sur le sens du deuxième sonnet. Certains proposent une version, mais nous respectons trop nos lecteurs pour la leur mettre sous les yeux.