Archives de catégorie : Mètre

Je suis élu, je suis damné! — 1872 (39)

Verlaine ed.Pléiade p.215

Le bon disciple

Je suis élu, je suis damné!
Un grand souffle inconnu m’entoure.
O terreur! Parce, Domine!

Quel Ange dur ainsi me bourre
Entre les épaules tandis
Que je m’envole aux Paradis?

Fièvre adorablement maligne,
Non délire, benoît effroi,
Je suis martyr et je suis roi,
Faucon je plane et je meurs cygne!

Toi le jaloux qui m’a fait signe,
(Or) me voici, voici tout moi!
Vers toi je rampe, encore indigne!
– Monte sur mes reins, et trépigne!

s.rev:  ede dcc abba abaa – octo

L’ange de l’Apocalypse, — 1872 (32)

Paul Arène et Alphonse DaudetLe Parnassiculet Contemporain

Absinthe
(Apocalypse, 10-11)

L’ange de l’Apocalypse,
Lumineux épouvantail,
Réveille l’humain bétail
Sur la montagne de gypse.

Il développe l’éclipse,
Ainsi qu’un noir éventail,
Et la planète en travail
S’arrête sur son ellipse.

L’herbe pousse au bord abject;
Elle embaume l’air infect;
Le cristal se coule et tinte;

Au fleuve l’Etoile choît,
Verte … et le poëte boit
Le poison qu’il nomme Absinthe.

Q15 – T15 – 7s

C’est un sonnet, pardonnez-moi. — 1872 (29)

Albert MillaudPetite Némésis


Quatorze vers

C’est un sonnet, pardonnez-moi.
En librairie il est d’usage
De mettre en tête d’un ouvrage
Une profession de foi.

Ces propos de première page
Font, – je n’ai jamais su pourquoi –
Chez le lecteur naître l’effroi …
On les lit peu – c’est bien dommage.

Mon avant-propos me gênait.
Pourtant il faut que je le fasse.
On peut me lire sans grimace.

Je suis très-court, très-bref, très-net ….
– Mais c’est toujours une préface!
Pardonnez-moi, c’est un sonnet.

Q16 – T28 – octo – s sur s

Si nous étions morts quand nous étions mômes — 1872 (25)

Album zutique

Nouveau

Sonnet
(dors-tu content, Voltaire)

Si nous étions morts quand nous étions mômes
Dites-moi, serions-nous plus malheureux?
A quoi donc nous sert de devenir hommes
Si c’est pour souffrir des maux plus nombreux!

Les petits plaisirs laissent désireux,
Tous nos petits sens ne font pas des sommes
Et c’est pour un X encor plus affreux
Qu’il nous faut quitter le monde où nous sommes.

Et nous avons beau nous mettre à genoux
Et beau t’implorer, tu ne tends vers nous
Jamais tes deux mains, Sainte Providence!

– C’est pourquoi, crois-moi, pauvre genre humain,
Chante et ris, sans trop croire au lendemain;
Va, saute, Arlequin; danse, Pierrot, danse!

Q11 – T15 – tara

Nous reniflerons dans les pissotières — 1872 (21)

Album zutique

Verlaine

La mort des cochons
Paroles de Baudelaire
Musique de M. le Comte Auguste  Mathias Villers de l’Isle-Adam

Nous reniflerons dans les pissotières
Nous gougnotterons loin des lavabos
Et nous lècheront les eaux ménagères
Au risque d’avoir des procès-verbaux.

Foulant à l’envi les pudeurs dernières
Nous pomperons les vieillards les moins beaux
Et fourrant nos nez au sein des derrières
Nous humeront la candeur des bobos.

Un soir plein de foutre et de cosmétique
Nous irons dans un lupanar antique
Tirer quelques coups longs et soucieux

Et la maquerelle, entr’ouvrant les portes
Viendra balayer, – ange chassieux –
Les spermes éteints et les règles mortes.

Q8 – T14 – tara

Al. Godillot, Gambier, — 1872 (20)

Album zutique

Rimbaud

conneries

II

Paris

Al. Godillot, Gambier,
Galopeau, Volf-Pleyel,
– O Robinets! – Ménier,
– O Christs! – Leperdriel!

Kinck, Jacob, Bonbonnel!
Veuillot, Tropmann, Augier!
Gill, Mendès, Manuel,
Guido Gonin! – Panier

Des Grâces! L’Hérissé!
Cirages onctueux!
Pains vieux, spiritueux!

Aveugles! – puis, qui sait?
Sergents de ville, Enghiens
Chez soi! – Soyons chrétiens!

Q11 – T30 – 6s