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coda 1 Rien, dans les branches où déjà se gonflent des bourgeons,

Jacques Réda La course

Le printemps
sur les Grands Boulevards
Rien, dans les branches où déjà se gonflent des bourgeons,
Ne retient ce matin la cataracte de lumière
Pour la première fois soudain brûlante – la première
Après tout un siècle d’hiver. Et lourd nous y nageons.

Sans foi parmi les claquements des ailes des pigeons,
Tout au long des Italiens, Montmartre, Poissonnière,
Englués par milliers dans la débauche printanière
Qui ruisselle des toits, flamboie au faîte des donjons

Bancaires étayés de géantes. Sur le bitume
Eblouissant qu’ont envahi des passants en costume
De fête, la chaleur a des frissons intermittents.

Mais laissons faire. La saison vaincra ses épouvantes,
Comme dans l’ombre qui noyait, près de l’Hôtel des Ventes,
Un petit paysage où l’or des anciens printemps
Brille encore.

L’arbre nous couvrira d’or et d’un nuage noir — 1981 (3)

OulipoAtlas de Littérature potentielle

Un membre de l’oulipo.

3
Tombeau de Graziella

L’arbre muet viendra vers l’angle de la pierre
Nous nous endormirons déliés du printemps
Agités par le bruit de la forêt humide
La lumière les yeux de l’eau paraîtront vides
Malgré ses vêtements d’aube le seul instant
Par disparition nus de la nuit longtemps
L’air nous couvrira d’or et d’un nuage noir
Nous boirons l’herbe sourde aux feuilles précieuses
Derrière son écran de cendre soucieuse
Le soleil entrera dans l’ombre sans nous voir
Où nous coucherons seuls coeurs arrachés d’espoir
Et le jour qui brillait de sa voyelle creuse
Sans lueurs oppressé là-haut de pluie furieuse
Disparaissant épaisse et sombre dans le soir
Rien n’aura plus de sens que mort élémentaire

L’arbre nous couvrira d’or et d’un nuage noir
Nous nous endormirons sourds aux feuilles précieuses
Agits par le bruit de la forêt soucieuse
La lumière entrera dans l’ombre sans nous voir

Malgré ses vêtements d’aube arrachés d’espoir
Par disparition nus de la nuit longtemps creuse
L’air sans lueurs oppressé là-haut de pluie furieuse
Nous boirons l’herbe épaisse et sombre dans le soir

Derrière son écran de centre élémentaire
Le soleil muet viendra vers l’angle de la pierre
Où nous coucherons seuls coeurs déliés du printemps

Et le jour qui brillait de sa voyelle humide
Disparaissant les yeux de l’eau paraîtront vides
Rien n’aura plus de sens que mort le seul instant.

Q15 – T15

L’unique sonnet composé par Lamarine, l’a été pour le tombeau de Graziella. Il décrivait leur tombe commune, face aux flots bleus, dans ‘l’île de Procide où la mer de Sorrente / Scande un flot hexamètre à la fleur d’oranger’. Or, il arriva que les plaques de marbre, où l’on grave le poème, furent par inadvertance interverties, si bien que le poème écrit par le poète, se trouva compter quinze vers, et ne plus ressembler à un sonnet.
On a reconstitué à la suite la version primitive.

Le même principe de composition est employé en 1981-2, à base d’hémistiches pris dans les ‘Cent mille milliards de poèmes’ de Queneau.