Archives de catégorie : Genre des rimes

Sous l’exact jersey bleu qu’ample sa gorge crève, — 1910 (8)

Paterne Berrichon Poèmes décadents 1883-1895

La belle femme

Sous l’exact jersey bleu qu’ample sa gorge crève,
Toute elle m’apparaît, avec sa majesté
Grasse, comme un royal fruit d’amour dont mon rêve
Morbide exprime et suce un sûr jus de santé;

Et comme un lac de chair, lorsque sur le lit, grève
De toile fleurant bon, s’épand le flot lacté
De ses molles lourdeurs qu’un vent de volupté
Gonfle et fait déferler ardemment et sans trêve!

Aussi quand près de moi, fiers et rythmant son pas,
Passent paradoxaux ses fluctuants appas,
Mon masque se rougit d’une pudeur intense,

Et, de la nuque aux pieds, m’érode le tourment
Sanguin d’un fol prurit qui noie en sa tentance
L’anémique Voulu de mon affinement.

Q9 – T14

J’ai voulu plonger jusqu’au fond dans ta chair, — 1910 (7)

Paterne Berrichon Poèmes décadents 1883-1895

Vertige

J’ai voulu plonger jusqu’au fond dans ta chair,
Front bas, pieds joints, tout; et j’en suis revenu
Sans moi, rien qu’avec encor de derme cher
A soi trop assez pour s’aimer vil et nu

Sous l’âcre épreinte du jeu de ta chair nue,
O panthère aux plasmatures de vachère!
Pour s’aimer vers toi, bien haïe et connue
D’abord comme, et toujours ensuite, en enchère,

Si que, des baisers d’un bain de chair mieux cher
De retour, je voudrais plonger dans ta chair:
Le démon de Poe et qu’Eve avait connu,

Ce soir de sang, vêt de pourpre maraîchère
Ses replis d’appels senestre sur ta nue,
O vachère à redondances de bouchère!

Q11 – T14  -Qu1 masc Qu2 fem – 11s

La neige de sa fleur splendide — 1910 (6)

Paterne Berrichon Poèmes décadents 1883-1895

Vierge slave

La neige de sa fleur splendide
N’est-ce que d’elle pur j’élus,
Mais bien ses regards résolus.
Je fus, un temps sous son égide.

Son front de sagesse candide
Gardant maint pli de livres lus,
Ce sans plus fut à quoi je plus.
Son cœur me demeura frigide.

Elle venait du Nord, d’un nord
Où, livides, les ours de mort
Tachent la blancheur des campagnes.

Ses vœux, steppes de chasteté,
Loin du potager des compagnes,
N’allaient qu’en abstraite bonté.

Q15 – T14 – banv – octo

L’orgueil des lourds anneaux, la pompe des parures, — 1910 (3)

Renée VivienPoèmes – ed. 1923 –

Sonnet

L’orgueil des lourds anneaux, la pompe des parures,
Mêlent l’éclat de l’art à ton charme pervers,
Et les gardénias qui parent les hivers
Se meurent dans tes mains aux caresses impures.

Ta bouche délicate aux fines ciselures,
Excelle à moduler l’artifice des vers:
Sous les flots de satin savamment entr’ouverts,
Ton sein s’épanouit en de pâles luxures.

Le reflet des saphirs assombrit tes yeux bleus,
Et l’incertain remous de ton corps onduleux
Fait un sillage d’or au milieu des lumières.

Quand tu passes, gardant un sourire ténu,
Blond pastel surchargé de parfums et de pierres,
Je songe à la splendeur de ton corps libre et  nu.

Q15 – T14

Ta voix a la langueur des lyres lesbiennes, — 1910 (2)

Renée VivienPoèmes – ed. 1923 –

Sonnet féminin

Ta voix a la langueur des lyres lesbiennes,
L’anxiété des chants et des odes saphiques,
Et tu sais le secret d’accablantes musiques
Où pleure le soupir d’unions anciennes.

Les Aèdes fervents et les Musiciennes
T’enseignèrent l’ampleur des strophes érotiques
Et la gravité des lapidaires distiques.
Jadis tu contemplas les nudités païennes.

Tu sembles écouter l’écho des harmonies
Mortes; bleu de ce bleu des clartés infinies,
Tes yeux ont le reflet du Ciel de Mytilène.

Les fleurs ont parfumé tes étranges mains creuses;
De ton corps monte, ainsi qu’une légère haleine,
La blanche volupté des vierges amoureuses.

Q15 – T14 – banv – Rimes féminines

Humaniste, gourmet, déiste et régicide, — 1910 (1)

Emile BergeratBallades et sonnets

La guillotine de poche . 1792.

Humaniste, gourmet, déiste et régicide,
Le sans-culottiseur de l’Isère et du Doubs
Porte dans un étui dont le cuir est très doux
Une guillotinette en verre translucide.

Quand la petite hache amusante s’oxyde
De rouille ci-devante, il la passe au saindoux
D’un pot enjolivé de rubans dits: padous
Qu’ornent des vers latins à la masse d’Alcide.

Elle lui sert à maints usages, notamment
A trancher sur le plat d’un Nouveau testament
Les têtes des canards, des lapins & des oies;

Car il n’aime que ceux dont il fut le Samson
Lui-même, et telles sont les innocentes joies
Du proconsul François Lejeune à Besançon.

Q15 – T14 – banv –   padou (TLF) Ruban moitié fil, moitié soie

Nul bruit, nul cri, nul choc dans les grands prés de soie — 1909 (6)

Jules de Marthold in  (Bertrand Millanvoye) Anthologie des poètes de Montmartre

Nuit d’or

Nul bruit, nul cri, nul choc dans les grands prés de soie
Où tout rit et sent bon sous le ciel bleu du soir,
Où, sauf le ver qui luit, on ne peut plus rien voir,
Où le chat-linx des bois va, court et suit sa proie;

La voix des nids en chœur dit son pur chant de joie;
Un cerf boit à sa soif, au guet, l’eau du lac noir,
Au pan creux d’un vieux mur dort en paix un vieux loir,
Et sous les feux de juin tout vit, tout croît, tout ploie,

Un vent chaud des blés mûrs fait un flot de la mer
Et sur les monts des pins ont cent longs bras de fer,
Sur un roc nu la tour plus que le roc est nue.

Doux et fort, œil mi-clos, roi du sol, un bœuf paît.
Il pleut sans fin, croit-on, des clous d’or en la nue.
Le temps court, le temps fuit, la nuit meurt, le jour naît.

Q15 – T14 – banv – sonnet de monosyllabes

Comme ces bûcherons qui abattent les chênes — 1909 (5)

Pierre Lièvre Jeux de mots

La bûcheronne

Comme ces bûcherons qui abattent les chênes
Et qui demeurent sourds aux grands gémissements
Que l’on entend répondre à tout coup qu’ils assènent
Sur le cœur douloureux de ces arbres puissants,

Méchante bûcheronne aux yeux froids et pervers
Sous tes coups meurtriers et sournois, tour à tour,
Sans prendre garde aux cris dont ils frappent les airs,
Tu as cruellement fait gémir mon amour.

Souffrant et mutilé s’il reste encor debout
S’offrant toujours aux chocs où tu le mets en butte,
C’est qu’en un cœur profond il plonge ses racines.

Redoute cependant ta fureur assassine,
Crains que l’arbre à la fin ne croule sous tes coups
Car il t’écraserait peut-être de sa chute.

Q62 – T40

Musique aux lèvres de l’épouse: — 1909 (4)

Léon Deubel L’arbre et la rose

Eté

Musique aux lèvres de l’épouse:
Les mots tremblent de volupté.
Fin de Juillet! la nymphe Eté
Râle d’amour sur les pelouses.

Oh! dans mes mains, mes mains jalouses,
Mes doigts par ses doigts invités,
Sentir avec suavité
Ses seins ériger leurs arbouses.

Sentir nos chairs évanouies,
Jointes, parmi les inouïes
Clameurs d’un enfer épié,

S’abîmer, quand le ciel dispose
– Coussin frangé d’or à nos pieds –
Un soir enluminé de roses.

Q15 – T14 – octo

X x x x x x x x x x x x x x x x x x x x x x — 1909 (3)

Georges Fourest La négresse blonde

Pseudo-sonnet que les amateurs de plaisanterie facile proclameront le plus beau du recueil
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Nemo (Nihil, cap 00)

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* Si j’ose m’exprimer ainsi (Note de l’auteur)

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