– Jean Goudezki Hercule ou la vertu récompensée
A la campagne
Ô
Trève
Brève
Au
Haut
Rêve !…
Eau!
Grève… !
Là
La
Plaine
Dort,
Pleine
D’or.
Q14 – T14 – mono
– Jean Goudezki Hercule ou la vertu récompensée
A la campagne
Ô
Trève
Brève
Au
Haut
Rêve !…
Eau!
Grève… !
Là
La
Plaine
Dort,
Pleine
D’or.
Q14 – T14 – mono
– Alfred Jarry – Les jours et les nuits
Parmi les bruyères, penil des menhirs,
Selon un pourboire, le sourd-muet qui rôde
Autour du trou du champ des os des martyrs
Tâte avec sa lanterne au bout d’une corde.
Sur les flots de carmin, le vent souffle en cor.
La licorne des mers par la lande oscille.
L’ombre des spectres d’os, que la lune apporte
Chasse de leur acier la martre et l’hermine.
Contre le chêne à forme humaine, elle a ri,
En mangeant le bruit de hannetons, C’havann,
Et s’ébouriffe, oursin, loin sur un rocher.
Le voyageur marchant sur son ombre écrit.
Sans attendre que le ciel marque minuit
Sous le batail de plumes la pierre sonne.
Q17 T21 11s
autre variation sur le sonnet d’Arvers
– Tristan Bernard
(télégramme-réduction à un quatrain d’octosyllabes du sonnet d’Arvers)
Ame a secret, vie a mystère.
Durable amour, vite conçu.
Mal sans espoir, donc dus le taire.
Celle qui le fit n’en rien sut.
– Robert de Souza Sources vers le fleuve
La Lumière
La lumière avait délié les fleurs d’entre les feuilles;
Les feuilles tendaient leurs petites mains tendues
Suppliantes, au-devant des chenilles velues;
Mais les chèvres renouaient le tout en une touffe, d’une faim qui cueille.
Et les hommes ne sentaient point la vie, espoir et deuil,
Les songes dormaient des femmes étendues nues
Par les gazons qui frisent, et font les chairs moussues,
Pour, sans doute, que d’humbles ombres rases cachent notre orgueil…
Ni les âmes ne connaissent les grandes ailes,
Ni les coeurs la volonté de leurs appels,
Seules les bouches s’ouvraient au plaisir d’être nées;
C’était l’attente vague des existences,
Qui ne sentaient pas quand les aurait enfin créées,
La Lumière qui relie toutes choses- par qui l’on pense.
Q15 – T14 – banv – m.irr
– Léopold Dauphin – Raisins bleus et gris –
Souhaits à Léopold Dauphin
1er janvier 1897
A toi, pauvre vieux, je souhaite
De vivre tel que te voilà
Avec les maux par-ci, par-là,
Et la rage d’être poète.
Pour que la douleur si souvent
Morde ton corps et le pâlisse
(Dixit Monsieur de la Palisse)
Il faut que ton corps soit souffrant:
Tu souffres, donc tu vis, que diable!
Et vivre est encor, vois-tu, vieux,
Ce qu’on nous a trouvé de mieux
Pour rendre la vie enviable.
Sois résigné, deviens meilleur
Et bon poète, rimailleur.
shmall – octo
– Léopold Dauphin – Raisins bleus et gris –
« Fais dodo … »
L’arrière saison s’avance
Avec, cortège automnal,
Les heures de connivence
Agissant pour le final.
Et mon âme, guêpe pâle,
Reste calme vers le soir
Des apeurements, du râle
Où vient la fin sans surseoir:
Elle écoute si l’appelle
Quelque voix par les ailleurs
Indifférente à la pelle
Lugubre des fossoyeurs.
La Terre n’est pas méchante:
Une berceuse, elle chante.
shmall – 7s
– Léopold Dauphin – Raisins bleus et gris –
Autre musique de chambre
Isochrone et lent, le pendule,
Sous les laques du vieux cartel,
D’un sec tic-tac hache et module
Le silence et mon spleen mortel:
Et ma pensée aussi oscille
En un va-et-vient continu
Captive du rythme et docile
A l’hypnotique son ténu
Qui très cruellement balance
Les souvenirs des anciens jours
Et, railleur, dans le noir silence
Sans cesse dit: « toujours, toujours ».
L’heure qu’il mesure est chimère
Eternellement éphémère.
shmall – octo
– Léopold Dauphin – Raisins bleus et gris –
A Paul Verlaine
8 janvier 1896
L’innocence était, de ton âme,
Et la mystérieuse voix
Si vierge et perverse à la fois,
Et l’amer parfumé dictame!
Nos espoirs pleurent superflus;
Cette voix tant câline et tendre,
Qu’au ciel aimé tu viens de rendre,
Nous ne l’entendrons jamais plus!
Ni le jet d’eau à la fontaine,
Ni fluides les clairs ruisseaux,
Ni la brise dans les roseaux
Ne la donneront si lointaine.
Et nous restons inconsolés,
Nous, de ses musiques ailées.
shmall* – octo
– Léopold Dauphin – Raisins bleus et gris –
A Stéphane Mallarmé
Ce marbre élevé que, hautain,
Tu voiles de nuit à long plis,
Nous garde en rythmes assouplis
Beauté sereine et fier dédain.
Nocturne aux rêves anoblis
De mystère, ta voix soudain
Eveille un idéal jardin
De reflets et d’échos pâlis.
Et je t’offre, moi – non pareilles
Aux fruits si vermeils vers les treilles
Que sont les lueurs du matin,
Ces rimes-ci vol immodeste
Devers ton oeuvre (adamantin
Malgré l’ombre) haut de ton geste.
Q16 – T14 – octo
– Paul Valéry Le Centaure
Vue
Si la plage penche, si
L’ombre sur l’oeil s’use et pleure,
Si l’azur est larme, ainsi
Au sel des dents pur effleure
La vierge fumée ou l’air
Que berce en soi puis expire,
Vers l’eau debout d’une mer
Assoupie en son empire,
Celle qui sans les ouïr
(Si la lèvre au vent remue)
Se joue à évanouir
Mille mots vains où se mue
Sous l’humide éclair des dents
Le très doux feu du dedans .
shmall – 7s