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Honneur de cette heureuse et brillante contrée, — 1814 (2)

–  Pierre-Louis Guinguené Fables inédites …

Sonnet à M. Piccini sur son opéra de Roland

Honneur de cette heureuse et brillante contrée,
Où Naples voit encor, sous le ciel le plus beau,
D’un laurier immortel la tige révérée
Du cygne de Mantoue ombrager le tombeau,

Ta lyre assez long-temps, aux Grâces consacrée,
Enchanta ces beaux lieux, fiers d’être ton berceau :
Tu viens charmer enfin notre oreille épurée,
Et joindre à tant de gloire un triomphe nouveau.

Vois frémir à tes pieds une ligue ennemie :
Ne redoutes plus rien de ses jaloux transports :
Que pourrait sa fureur sur les fruits du Génie ?

Roland te soutiendra seul contre ses efforts ;
Et les cris étouffés du Démon de l’Envie
Prêtent un nouveau charme à tes divins accords.

Q8  T20

Dévoré du poison de la mélancolie, — 1812 (1)

Jean-Hubert Hubin Poésies diverses

Sonnet sur la paix

Dévoré du poison de la mélancolie,
Nourri dans les chagrins, accablé de travaux,
Je pleure le passé; le présent m’humilie;
Et du triste avenir je redoute les maux.

La flatteuse espérance à mon âme est ravie.
Mes jours sont ténébreux et mes nuits sans pavots,
Je traîne en murmurant le fardeau de la vie,
Et de l’éternité j’invoque le repos.

Quel changement soudain! au milieu d’une nue
La paix, la douce paix apparaît à ma vue,
Et le calme renaît dans mon coeur abattu.

O fille de Thémis! divinité prospère!
Fixe enfin à jamais ton séjour  sur la terre;
Ramène les plaisirs, les moeurs et la vertu.

Q8 – T15

O Rome qu’as-tu fait du Trône des Césars ? … — 1811 (3)

M. Berdheil aîné, Principal du Collège de Foix (Arriège) in Hommages Poétiques à leurs Majestés Impériales et Royales sur la naissance de S.M. le Roi de Rome

O Rome qu’as-tu fait du Trône des Césars ? …
Toi qu’on vit si long-tems Souveraine du Monde,
Que sont donc devenus tes nombreux étendarts ? …
Toujours gémiras-tu dans une nuit profonde ?

Hélas ! de ta grandeur tout n’offre à mes regards
Que des tombeaux fameux, et que la Terre inonde ;
L’aigle des Scipions n’orne plus tes remparts ;
Ton Capitole dort, lorsque la foudre gronde.

Où sont Empereurs, tes exploits, tes vertus ? …
De ton antique nom il ne te reste plus
Que de justes regrets dont s’afflige l’Histoire.

LEVE-TOI ! … Vois ta force ! … et calme tes esprits ! …
Ce règne qui faisait jadis toute ta Gloire,
NAPOLéON l’efface en te donnant son Fils.

Q8 – T14     C’est l’unique sonnet contenu dans le volume, de plus de 500 pages; témoignage du peu de place réservé à la forme-sonnet dans la poésie de ces années

Sire, /D’un enfant bien chéri long-temps avant de naître, —1811 (1)

de Meulenaer

Sonnet pour féliciter S.M. l’empereur

Sire,
D’un enfant bien chéri long-temps avant de naître,
Le sexe désiré répond à tes souhaits.
Partout la joie éclate, et te donne à connoître
Que ton Fils est déjà l’espoir de tes sujets.

L’Empire sous la loi d’un sage et puissant maître,
Voit son destin fixé! Sa splendeur, à la paix,
Ne pourroit augmenter. Qui voudroit méconnoître
Que le ciel t’aie élu pour remplir ses décrets?

Monarque fortuné, l’univers te contemple!
A toi seul tout sourit! Ton bonheur sans exemple,
Aux peuples étonnés paroît surnaturel.

J’admire tes succès! permets cet humble hommage
Pour toi, pour ta compagne et pour le premier gage
Du plus brillant hymen qu’ait béni l’Eternel.

Q8 – T15

En dépit de la grande banalité du texte et de sa forme, l’oeuvre de de Meulenaer vaut par ce fait curieux que les nécessités de l’adresse à un personnage aussi majestueux que Napoléon l’amènent à une innovation qui aurait pu être reprise et amplifiée: l’introduction, dans le texte du poème, et extérieurement aux quatorze vers, d’un ou plusieurs mots; ici le mot ‘Sire’.

Que ta loi, Dieu puissant, est douce et consolante ! — 1809 (2)

J.M.Mossé Poésies

Sonnet religieux

Que ta loi, Dieu puissant, est douce et consolante !
Elle fait oublier le plus rigoureux sort ;
Et mon âme, en souffrant du mal qui la tourmente,
S’élance jusqu’à toi par un sublime effort.

Quel est l’être insensé, dont l’humeur insolente
Ose nier son Dieu, se croyant esprit-fort ?
N’entend-il pas sans cesse une voix menaçante
Qui lui dit : Vain Mortel ! tremble ! voici la mort ! –

J’idolâtre tes lois ; tes décrets sont trop justes
Pour faire murmurer de tes pouvoirs augustes ;
Et je bénis les maux qui m’accablent toujours.

J’ai péché, je le sais, grand Dieu, je le confesse ;
Pardonne à ton enfant, qui vit dans la détresse,
Et vient le consoler par ton divin secours.

Q8  T15

Le temple du dieu Mars, séduit par sa beauté; — 1804 (2)

Abbé Pierre David

Sur le temple du dieu Mars

Le temple du dieu Mars, séduit par sa beauté;
L’or, le jaspe et l’azur, ornent son péristyle.
La façade éblouit, dans sa totalité;
C’est l’ouvrage des dieux, ou d’une fée habile.

Au dehors, il a l’air d’un palais enchanté;
Mais je tremble en entrant dans ce barbare asile;
Le désespoir, la rage et la férocité,
Tous les fléaux ensemble y font leur domicile.

Son parvis est jonché, de blessés, de mourants,
Qui vous percent le coeur par des cris déchirans;
La mère y pleure un fils, le fils y cherche un père.

Plus loin le crime* heureux, assis au premier rang,
Ravage les Etats, les comble de misère,
Ne sourit qu’à la mort, et ne vit que de sang.

* Le Corse.

Q8 – T14

Qu’à l’aspect de ces tours tout pâlisse d’effroi; — 1802 (3)

Abbé Pierre David Première épitre à M. L’abbé Sicard ….

Deuxième sonnet, sur la prison du Temple, où le trop bon Louis XVI a été détenu

Qu’à l’aspect de ces tours tout pâlisse d’effroi;
Elles ont vu crouler la puissance suprême;
C’est ici que la rage a dépouillé le Roi,
De ses titres pompeux et de son diadème.

D’obscurs agitateurs, sans équité, sans foi,
Pour réduire le vol et le meurtre en système,
Osèrent s’emparer du sceptre de la loi,
Et juger, condamner le Monarque lui-même.

Que le Ciel irrité, lance tous ses carreaux!
Que l’enfer, contre nous, déchaîne ses bourreaux!
Verseraient-ils jamais tant de maux sur la France.

Ce lâche assassinat, source de nos malheurs,
Fit naître la terreur et régner la licence,
Qui nous ont tous courbés sous le joug des voleurs.

Q8 – T14

Les parfums de l’aurore ont devancé le jour; — 1802 (2)

Abbé Pierre David Première épitre à M. L’abbé Sicard ….

« L’AUTEUR, étant au secret le plus rigoureux, dans la tour du Temple, n’ayant ni plumes, ni encres ni papier, écrivait dans sa tête des sonnets.  » (Il est donc un P.L.A.N.T. (Plagiaire par anticipation) de Jean Cassou et de ses ’33 sonnets composés au secret » (1944)).

2 Premier sonnet, sur le lever du Soleil, pour un prisonnier

Les parfums de l’aurore ont devancé le jour;
Ses perles, ses rubis, se répètent dans l’onde;
La topaze du Ciel se dérobe à sa Cour,
Et ses rayons naissans vont éclairer le monde.

Hélas! j’eusse cent fois célébré son retour,
Depuis qu’on m’a plongé dans cette nuit profonde!
Mais enterré, vivant dans une obscure tour,
Je ne puis observer sa chevelure blonde.

Son disque étincelant, rempli de majesté,
Etale à l’univers un luxe de clarté,
Et va donner la vie à la nature entière.

De quoi sert, au captif, cette vive splendeur?
Avare pour lui seul, ce grand corps de lumière,
Ne lui laisse entrevoir que l’excès du malheur.

Q8 – T14

Fille auguste du ciel, ô paix tant désirée ! — 1801 (2)

Viviand-Bellerive Les Pyramides d’Egypte, ode au premier Consul

Invocation à la Paix

Fille auguste du ciel, ô paix tant désirée !
Abaisse enfin sur nous tes consolans regards,
Abandonne l’Olympe où tu t’es retirée :
L’humanité t’appelle au sein de nos rempars !

Fais envier ton règne à l’Europe égarée,
Succéder le repos aux jeux sanglans de Mars,
Et que chez les Français ton olive sacrée
Ranime l’industrie et réchauffe les arts !

D’une mère et d’un fils, viens essuyer les larmes,
Arrête la fureur des peuples et des rois,
Qu’aux pieds de ton autel ils déposent leurs armes !

Pour soutenir le trône, ou défendre leurs droits,
Si les cruels humains furent sourds à ta voix,
Ils en sont trop punis par douze hivers d’alarmes !

Q8  T21