Archives de catégorie : 1-fem

sonnets à première rime féminine (Malherbe)

Vaucluse, cet air pur qui du sein de tes ondes — 1816 (2)

Léonce de Saint-Geniès Poésies de Pétrarque traduites en vers français

CXCVI

Vaucluse, cet air pur qui du sein de tes ondes
S’élève en murmurant à travers les rameaux,
Me rappelle le jour qui vit naître mes maux,
Et ravive en mon cœur ses blessures profondes.
Avec l’haleine du zéphir
Je respire le souvenir
Des plus doux momens de ma vie.
Là, j’ai vu sans obstacle éclater tant d’appas
Et l’ombrageuse jalousie
Alors ne m’en séparait pas.
Au souffle heureux des vents livrant sa chevelure,
Contente de ses seuls trésors,
Elle n’y mêlait point alors
De l’or, des diamants l’inutile parure.
Mais hélas ! condamnée à de brillans atours
Elle reçoit au sein des cours
Des mains de la fortune un pompeux esclavage ;
Et moi, solitaire et sauvage,
Je viens revoir ce beau rivage
Où j’ai reçu des fers par la main des Amours.

Tr

Mr de Saint-Geniès a besoin de 20 vers, mêlant alexandrins et octosyllabes, pour traduire, de fort loin, le sonnet cxcvi du Rerum Vulgarum Fragmenta (L’aura serena che fra verdi fronde)

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Introuvable, de Jean Mannoury-Dectot l’Ode en deux sonnets placée sur le catafalque de Louis Xvi le 21 janvier 1816 (Alençon), réimprimée la même année à Paris comme ‘sonnets …’

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Dans un lointain obscur, quel effrayant nuage — 1815 (1)

Marie-Joseph Dalles in Recueil de l’Académie des Jeux Floraux, 1814-1816

Sonnet à la Vierge

Dans un lointain obscur, quel effrayant nuage
S’avance en déroulant ses noirs et longs replis ?
Dans les airs embrasés il balance l’orage
Et s’arrête en grondant sur l’Empire des Lis.

Tout tremble, tout frémit …. mais déjà dans sa rage
La foudre a dévoré le trône de LOUIS.
VIERGE, appui des Français, sauve ton héritage,
Sauve les Rejetons d’un sang que tu chéris.

O prodige ineffable ! ô retour plein de charmes !
Après tant de malheurs, de regrets et de larmes,
Tu rends à  notre amour les objets de nos vœux.

Ta Main brise nos fers, l’humanité respire :
Le Juste a triomphé : la palme du martyre
S’incline vers la France et plane dans les Cieux.

Q8  T15

L’année de Waterloo n’a guère été favorable au sonnet; je n’ai réussi à en trouver qu’un seul (certainement postérieur à l’événement !)

Honneur de cette heureuse et brillante contrée, — 1814 (2)

–  Pierre-Louis Guinguené Fables inédites …

Sonnet à M. Piccini sur son opéra de Roland

Honneur de cette heureuse et brillante contrée,
Où Naples voit encor, sous le ciel le plus beau,
D’un laurier immortel la tige révérée
Du cygne de Mantoue ombrager le tombeau,

Ta lyre assez long-temps, aux Grâces consacrée,
Enchanta ces beaux lieux, fiers d’être ton berceau :
Tu viens charmer enfin notre oreille épurée,
Et joindre à tant de gloire un triomphe nouveau.

Vois frémir à tes pieds une ligue ennemie :
Ne redoutes plus rien de ses jaloux transports :
Que pourrait sa fureur sur les fruits du Génie ?

Roland te soutiendra seul contre ses efforts ;
Et les cris étouffés du Démon de l’Envie
Prêtent un nouveau charme à tes divins accords.

Q8  T20

Dévoré du poison de la mélancolie, — 1812 (1)

Jean-Hubert Hubin Poésies diverses

Sonnet sur la paix

Dévoré du poison de la mélancolie,
Nourri dans les chagrins, accablé de travaux,
Je pleure le passé; le présent m’humilie;
Et du triste avenir je redoute les maux.

La flatteuse espérance à mon âme est ravie.
Mes jours sont ténébreux et mes nuits sans pavots,
Je traîne en murmurant le fardeau de la vie,
Et de l’éternité j’invoque le repos.

Quel changement soudain! au milieu d’une nue
La paix, la douce paix apparaît à ma vue,
Et le calme renaît dans mon coeur abattu.

O fille de Thémis! divinité prospère!
Fixe enfin à jamais ton séjour  sur la terre;
Ramène les plaisirs, les moeurs et la vertu.

Q8 – T15

Sire, /D’un enfant bien chéri long-temps avant de naître, —1811 (1)

de Meulenaer

Sonnet pour féliciter S.M. l’empereur

Sire,
D’un enfant bien chéri long-temps avant de naître,
Le sexe désiré répond à tes souhaits.
Partout la joie éclate, et te donne à connoître
Que ton Fils est déjà l’espoir de tes sujets.

L’Empire sous la loi d’un sage et puissant maître,
Voit son destin fixé! Sa splendeur, à la paix,
Ne pourroit augmenter. Qui voudroit méconnoître
Que le ciel t’aie élu pour remplir ses décrets?

Monarque fortuné, l’univers te contemple!
A toi seul tout sourit! Ton bonheur sans exemple,
Aux peuples étonnés paroît surnaturel.

J’admire tes succès! permets cet humble hommage
Pour toi, pour ta compagne et pour le premier gage
Du plus brillant hymen qu’ait béni l’Eternel.

Q8 – T15

En dépit de la grande banalité du texte et de sa forme, l’oeuvre de de Meulenaer vaut par ce fait curieux que les nécessités de l’adresse à un personnage aussi majestueux que Napoléon l’amènent à une innovation qui aurait pu être reprise et amplifiée: l’introduction, dans le texte du poème, et extérieurement aux quatorze vers, d’un ou plusieurs mots; ici le mot ‘Sire’.

Qui n’admire, à Paris, qu’une auguste puissance, —1810 (1)

Tournetoris L’art Musical relatif à l’accord de piano….

sonnet.  Sur les embellissements de Paris.

Qui n’admire, à Paris, qu’une auguste puissance,
Donne aux vieux monumens la fraîcheur des nouveaux!
La foule d’artisans, qui vit en ces travaux,
Annonce que Minerve en dicta l’ordonnance.

Par un arc de triomphe, emblème de vaillance,
L’artiste, au Carousel, étonne ses rivaus;
Et Mars, pour l’entourer de vingt mille chevaux,
Au second bras du Louvre a fait prendre naissance.

Quel lieu ne se dispose à charmer nos regards!
Des fontaines, des ponts, des quais, des boulevards ….
Croissent comme des fleurs qu’un zéphir dévelope.

Un tel enchantement nous montre le pouvoir
Du héros que les dieux rendirent à l’Europe,
Quand le trouble eut livré la France au désespoir.

Q15 – T14 – banv

Un beau titre, celui de l’ouvrage de ce ‘facteur d’instrumens’ : L’art Musical relatif à l’accord de piano, suivi de deux sonnets, de trois stances, et de l’art de faire la conquête des belles. La forme de son sonnet est régulière (au sens des traités des siècles précédents). (Et c’est même la variante qui a été ensuite préconisée comme modèle absolu par Banville)

Que ta loi, Dieu puissant, est douce et consolante ! — 1809 (2)

J.M.Mossé Poésies

Sonnet religieux

Que ta loi, Dieu puissant, est douce et consolante !
Elle fait oublier le plus rigoureux sort ;
Et mon âme, en souffrant du mal qui la tourmente,
S’élance jusqu’à toi par un sublime effort.

Quel est l’être insensé, dont l’humeur insolente
Ose nier son Dieu, se croyant esprit-fort ?
N’entend-il pas sans cesse une voix menaçante
Qui lui dit : Vain Mortel ! tremble ! voici la mort ! –

J’idolâtre tes lois ; tes décrets sont trop justes
Pour faire murmurer de tes pouvoirs augustes ;
Et je bénis les maux qui m’accablent toujours.

J’ai péché, je le sais, grand Dieu, je le confesse ;
Pardonne à ton enfant, qui vit dans la détresse,
Et vient le consoler par ton divin secours.

Q8  T15

J’ai huit pieds, cher lecteur, et mon tout fait pour plaire —1808 (7)

P.J. Charrin Mes loisirs ou Recueil de poésies

Logogriphe A Mademoiselle *** A ***

Sur son nom

J’ai huit pieds, cher lecteur, et mon tout fait pour plaire
S’il s’offrait à tes yeux maîtriserait ton coeur.
Tu me nommes souvent pour peindre ton bonheur,
J’habite en même temps et les cieux et la terre.

Cherche, et tu trouveras, en me décomposant
D’un peuple quel qu’il soit la moins brillante classe,
Un meuble précieux, duquel on ne se passe
Sans qu’on y soit contraint par un événement.

Un arbre, un des quartiers de cette grande ville,
Une substance amère, et parfois très-utile,
Un endroit isolé, défendu par les eaux,

Le corps le plus vaillant, le plus beau d’une armée,
Enfin, un de ces jours dont l’enfance est charmée,
Et qui furent toujours consacrés au repos.

Q63 – T15

On a affaire ici à un de ces jeux de société dont le dix-huitième siècle fut friand. (Je renvoie à l’indispensable ouvrage de Claude Gagnaire ‘Pour tout l’or des mots‘, pour la définition du logogriphe).

Solution due à Alain Chevrier:

J’ai huit pieds, cher lecteur, et mon tout fait pour plaire
S’il s’offrait à tes yeux maîtriserait ton coeur.
Tu me nommes souvent pour peindre ton bonheur, = FéLICITÉ
J’habite en même temps et les cieux et la terre. = FéE (ou ELFE ?)

Cherche, et tu trouveras, en me décomposant
D’un peuple quel qu’il soit la moins brillante classe = LIE
Un meuble précieux, duquel on ne se passe
Sans qu’on y soit contraint par un événement: = LIT

Un arbre, = IF un des quartiers de cette grande ville = CITÉ,
Une substance amère = FIEL et parfois très-utile,
Un endroit isolé, défendu par les eaux, = ILE

Le corps plus vaillant, le plus beau d’une armée, = ÉLITE
Enfin, un de ces jours dont l’enfance est charmée, = FêTE
Et qui furent toujours consacrés au repos.

En résumé :
Félicité : fée (ou elfe), lie, lit, cité, fiel, île, élite, fête.

Il vient à moi l’oiseau qui nous prédit l’orage, — 1808 (6)

Stanislas de Boufflers Recueil de Poésies, extraits des ouvrages d’Hélène-Maria Williams, ….

Le courlis

Il vient à moi l’oiseau qui nous prédit l’orage,
Appelé par le bruit du flot qui bat ces bancs;
Il livre aux aquilons son grisâtre plumage,
Et mêle un cri plaintif à leurs rugissemens.

Triste oiseau! Nous avons un même caractère.
Plus sauvage que toi, j’aime à porter mes pas
Entre les rocs épars sur ce bord solitaire;
Les plus rians bosquets sont pour moi sans appas.

O mer! Je t’aime calme, et j’aime ta furie!
Quand je vois les courans, sur ta surface unie,
Fuir en traits lumineux, je m’arrête en disant:

Voici comme ils ont fui, les beaux jours de ma vie!
A tes flots, sur tes flots se pressant, se brisant,
Peignent trop bien mon coeur tel qu’il est à présent.

Q59 – T8

Toi qu’on voit dans les airs suspendre un beau feuillage — 1808 (5)

Stanislas de Boufflers Recueil de Poésies, extraits des ouvrages d’Hélène-Maria Williams, ….

Sonnet sur le calebassier

Toi qu’on voit dans les airs suspendre un beau feuillage
Dont le soleil encor rehausse les couleurs,
Tandis qu’au malheureux couché sous ton ombrage
Ton riche fruit présente un sac consolateur!

Quand je porte vers toi mes pas involontaires,
Je sens parmi tes fleurs mon chagrin endormi;
Ton ombrage invitant et tes fruits salutaires
Offrent à mon esprit l’image d’un ami.

Tu me peins l’amitié qui, soigneuse et discrète,
Travaille à refermer les blessures du coeur,
Et, d’un mal incurable émoussant la douleur

Verse un baume secret sur la peine secrète.
Je sais trop que le baume est peu sûr, mais, hélas!
Il adoucit du moins ce qu’il ne guérit pas.

Q59 – T30